Noël à voir et à entendre

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À l’approche du 25 décembre, une certaine exaltation est palpable. Les faubourgs d’ordinaire tristement vêtus, se parent de mille feux. Guirlandes et autres néons lumineux attirent l’œil. Il n’est plus vraiment question de ferveur ni de croyance religieuse. La naissance de Jésus a cédé la place à l’avènement du mercantilisme. Les foules se précipitent dans les magasins, anxieuses de ne pouvoir se procurer le dernier objet à la mode. Les trottoirs enneigés débordent de cette multitude en quête d’un présent à offrir.

Il faut dire que la période est riche en propositions alléchantes. Dans tous les domaines possibles. Les individus croulent sous une infinité d’offres toutes plus convaincantes les unes que les autres. Dès lors choisir s’avère difficile. Et ce, tant face à un téléviseur ou un frigo que devant un film ou un livre. Le déluge d’informations est tel que l’individu peine à s’y frayer un chemin.
C’est pourquoi nous nous proposons de vous en souffler un parmi la quantité astronomique dont il dispose.

DU CÔTÉ DE LA MUSIQUE

Noël demeure depuis longtemps le prétexte à de nombreuses productions musicales. Un répertoire solide s’est forgé au fil des décennies. À l’origine religieux, il est devenu assez logiquement un formidable terreau profane.

De Franck Sinatra à Tino Rossi en passant par Elvis Presley, une tradition populaire continue de trouver écho au moment des fêtes. Du coup, besoin est de trancher. Deux albums se sont alors imposés.

D’une part, If On A Winter’s Night de Sting. L’ex chanteur de The Police a parcouru un long chemin. Chacun de ces opus relève désormais d’une exploration, d’un certain voyage musical authentique. Ici, accompagné de pointures (Dominic Miller à la guitare ou Vincent Ségal au violoncelle), Sting plonge l’auditeur au cœur d’un répertoire large mais cohérent. Très soigné, il oscille entre berceuses et cantiques, entre Purcell (Cold Song) et chants traditionnels (Soul Cake). La voix, bien moins criarde qu’au temps de Roxanne, se fait le messager délicat de titres dépoussiérés et arrangés avec style. Parfois un peu maniéré, mais jamais superficiel, l’ensemble reste sobre et définitivement convaincant.

L’autre album est celui de Bob Dylan intitulé Christmas in The Heart. Le père de la Protest-Song revient ici avec une visite haute en couleurs de 15 titres issus du  répertoire classique de Noel. Le single Must Be Santa donne un bon aperçu de la teneur globale du projet. Dylan, bonnet de père Noël sur la tête, délivre une version décalée de cet hymne américain. Sa voix ténébreuse à l’image de Tom Waits, teinte ces chants de saveurs encore inédites. Plus question d’exhalaisons douceâtres. Ni d’arrangements sirupeux. Les musiciens façonnent au contraire une figure rajeunie de ces morceaux rendus folks et dansants pour l‘occasion. Précisons enfin que Bob Dylan n’a pas délaissé ses actions sociales. Ainsi, les gains des ventes seront renversés à des associations luttant contre la faim dans le monde. Ce qui en ces jours de climat sévère et de durcissement de la pauvreté, ne peut apparaître que comme une action louable.

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DU CÔTÉ DES IMAGES

Évidemment le cinéma n’est pas en reste. Noël coïncide avec une avalanche de sorties toutes plus ou moins programmées pour l’occasion. Les enfants en vacances désirent des contes extraordinaires. Les studios, dont Disney reste la meilleure démonstration, s’évertuent donc à produire du rêve.

Des histoires fantastiques capables de fédérer les petits mais aussi les grands si possible. À cet égard, les films à l’affiche cette année sont naturellement inégaux. Une constante pourtant: la parti pris de la technologie. L’évasion s’opère maintenant en 3D, procédé immersif qui plonge le public au cœur même  du monde féerique.

Dès lors notre choix s’est porté sur Avatar de James Cameron. Plébiscité par tous les médias, vendu comme un étape révolutionnaire du médium, nous ne pouvions l‘éviter. Cameron, créateur des Terminator et Titanic, aime les projets pharaoniques. Nabab hollywoodien, il s’amuse à fomenter des films gigantesques qui ne passent jamais inaperçus. Son dernier-né s’inscrit bien dans cette lignée. Les salles sont remplies, les avis assez unanimes. Le pari semble a priori gagné. Mais de quoi s’agit-il ? Dans un avenir proche, les humains manquent de ressources. Et pour pallier à ces carences énergétiques, ils décident de s’emparer d’un minerai précieux sur la planète Pandora. Mais tout n’est pas si simple. Pandora est habitée par les Navi, peuple solidement attaché à sa terre et résolument décidé à ne pas se laisser piller de la sorte.

Le monde qui se déploie sous le regard des spectateurs est alors d’une singulière beauté. Pandora, planète verte, à la nature luxuriante captive le public. De même, ces Navi, sortes de géants bleutés fascinent par le rendu de leurs mouvements et expressions. Le système de la 3D prend tout son sens. Cameron et son équipe ont exploité à merveille l’étendue des possibles du processus. Jamais sans doute le public n’a eu l’occasion d’assister de si près à une histoire imaginaire. Le rendu au combien graphique étonne, et ne peut laisser indifférent.

Malgré tout, le film n’en demeure pas moins exempt de défauts. Cette tendance sacro-sainte à l’universalité conduit à des sacrifices. En résulte une simplification scénaristique agaçante. Les personnages manquent cruellement d’épaisseur. Qu’il s’agisse du colonel, stéréotype du militaire cruel et barbare ou bien même du héros, tiraillé entre la voix de la raison et les voies du cœur, le constat demeure décevant. S’ajoute à ce degré psychologique quasi-inexistant, une impression paradoxale de déjà-vu. Car les innovations visuelles ne peuvent pas tout masquer. Ainsi, le parcours du protagoniste, la morale écolo et l’espèce d’actualisation du mythe du bon sauvage résonnent comme autant d’idées et de représentations usités.

Disons en fin de compte qu’Avatar relève du spectacle total. Rarement un film d’un point de vue visuel du moins, n’a su si bien rendre vivant et dynamique un univers onirique. À l’évidence et ce, malgré les pénuries évidentes inhérentes au genre du spectaculaire, c’est le film à voir en salles pour toute la famille à Noël.

Noël demeure donc bien un moment déterminant  pour la production culturelle. Mais un moment foisonnant au sein duquel s’orienter relève de l’épreuve de force. Les studios de cinéma comme les maisons de disque ne lésinent pas sur les moyens. L’oeil et les oreilles sont maintenues constamment en alerte. L’aspect religieux décline à mesure que les grandes surfaces regorgent de clients. Noël est un tourbillon qui nécessite parfois quelques conseils. C’est-ce que nous avons essayé de faire avec ce modeste dossier.

Guillaume Blacherois

Sting, If On A Winter’s Night, Universal Music, à partir de 9,99 euros.
Bob Dylan, Christmas In The Heart, Colombia, à partir de 12,99 euros.

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