Présidentielle 2012 : entretien avec Renaud Camus

/Renaud Camus est écrivain. À l’occasion de la parution de L’Abécédaire de l’In-nocence, il a annoncé sa candidature pour les prochaines élections présidentielles.
Avec lui, nous avons abordé quelques-unes des très nombreuses propositions du parti de l’In-nocence.

Culturemag : Vous vous portez candidat à la candidature de la présidence de la République à la tête du parti de l’In-nocence. Pouvez-vous nous présenter brièvement ce parti : depuis quand existe-t-il et quelle est sa raison d’être ?

Renaud Camus : Le parti de l’In-nocence existe depuis 2002. Il a été fondé au lendemain de la fameuse élection présidentielle de cette année-là, par désespoir, de ma part, de n’avoir pu voter pour personne : ni pour celui qui incarnait la politique suivie bon an mal depuis trente ans et qui nous avait menés là où nous sommes, ni pour celui qui sur un point essentiel, à savoir l’immigration de masse, avait vu juste mais s’ingéniait à rendre impossible, à force de « petites phrases » et de jeux de mots atroces, tout ralliement à son parti et à sa personne, comme s’il ne voulait pas du pouvoir qu’il réclamait.

CM : L’Abécédaire de l’In-nocence qui vient d’être publié aux éditions David Reinharc a valeur de programme politique. Le parti de l’In-nocence s’y exprime sur de très nombreux sujets, comme ferait tout bon programme politique, et ménage, me semble-t-il, une très large place à l’éducation et à la culture. Pensez-vous que ce sont là deux piliers d’une société ?

R.C. : Absolument. Pas les deux seuls, mais ce sont des piliers porteurs, sans lesquels l’édifice ne tient pas. Ce qui survient n’aurait pas été possible sans ce que j’ai appelé dans un autre livre La Grande Déculturation. Ce qui menace à présent c’est la décivilisation, le réensauvagement du monde, le retour à une situation antérieure à tout contrat social, à ce que nous appelons le pacte d’in-nocence, c’est-à-dire de non-nuisance, que ce soit à l’égard de la nature, de la Cité ou des concitoyens. Les concitoyens le sont évidemment de moins en moins dans la mesure où ils sont de moins en moins citoyens, pour commencer, ce terme-là étant vidé de sens par l’abolition quasi-totale de la différence avec son contraire, non-citoyen.

CM : Par le biais de l’immigration et de la croissance démographique, vous revenez régulièrement dans cet Abécédaire sur un thème cher au parti de l’in-nocence : celui du Grand Remplacement. Pouvez-vous nous expliquer ce que signifie cette expression ?

R.C. : Elle désigne la passage dans la triste réalité de ce qui était chez Brecht une boutade, changer de peuple (puisqu’on ne peut pas changer de gouvernement). Robert Redeker interroge les implications philosophiques d’un corps nouveau, qu’il appelle Egobody et dont les membres seraient indéfiniment remplaçables.
À une autre échelle, les remplacistes considèrent que les membres d’un peuple sont indéfiniment remplaçables eux aussi, par les membres d’autres peuples, et qu’après remplacement ce sera toujours le même peuple. Ils estiment que s’il n’y a pas assez d’Espagnols pour payer les retraites des Espagnols, il suffit de faire venir des Marocains, des Mauritaniens, des Maliens, qui feront de parfaits Espagnols. Le remplacisme n’a qu’un défaut, c’est qu’il suppose des hommes imaginaires et bien sûr des peuples imaginaires.
Mais cet homme nouveau qu’exigent les remplacistes, et dont la perspective fait trembler étant donné le paradoxal lourd passé de l’homme nouveau, ils savent bien, plus ou moins consciemment, que seul le rend possible la déculturation de masse.
Les peuples qui connaissent leurs classiques ne se laissent pas mener sans regimber dans les poubelles de l’histoire. Il est donc impérieux de les leur faire oublier — à quoi le système scolaire et universitaire s’entend à merveille.

CM : Dans cet Abécédaire, vous fustigez (et tout le parti de l’In-nocence avec vous) de manière récurrente l’antiracisme que, à la suite d’Alain Finkielkraut, vous qualifiez de communisme du XXIe siècle. En quoi l’antiracisme est-il un problème ? Ne devrions-nous pas considérer le refus de toute forme de racisme comme une grande avancée de notre société ?

R.C : Nous ne fustigeons pas du tout l’antiracisme en tant que tel mais l’antiracisme dogmatique, ce que nous appelons l’antiracistisme, un mot meilleur restant à trouver. L’antiracisme en tant que morale a notre soutien total. Ce que nous critiquons c’est l’antiracisme comme dogme, comme stéréotype, comme convention de discours, comme arme absolue de langage, comme pouvoir politique et économique (un des plus gros employeurs de France, par le biais des associations subventionnées), comme moyen de faire carrière et de constituer des féodalités, comme instrument permanent d’aveuglement, de réduction au silence, de censure, d’étouffement de la vérité et maintenant de chantage pur et simple (voyez par quels élégants arrangements se sont négociées la récente « affaire Guerlain » ou celle du directeur de cabinet de M. Hortefeux…).

CM : Le parti de l’In-nocence entend lutter contre toutes les nocences. Il a pour ambition de civiliser les Français en insistant sur la politesse et l’altruisme. Il propose également de prendre soin des personnes âgées trop souvent maltraitées et qui devraient être considérées comme une force pour la France. Il estime que le vieillissement de la population n’est aucunement un problème.
Sans nier que la sagesse vienne généralement avec l’âge et qu’un peu plus de civilité ne saurait nuire à notre pays, ne craignez-vous pas qu’une société trop policée et dont la jeunesse serait très minoritaire ne devienne quelque peu étouffante pour cette jeunesse ? Celle-ci semble nourrir assez peu d’espoir sur son avenir, désespérant de jamais trouver sa place dans un pays que la génération précédente a totalement verrouillé. En lisant
l’Abécédaire de l’In-nocence, on se dit que vous parlez assez peu de cette jeunesse, si ce n’est au travers de l’éducation. Une société qui ne se préoccuperait pas de sa jeunesse a-t-elle un avenir ?

R.C. : Une société qui se préoccupe au premier chef de l’éducation et de son niveau de qualité est une société qui fait pour la jeunesse le principal, c’est-à-dire qui lui donne les moyens de sa liberté, qui fait tout pour que chaque nouveau citoyen ait une chance égale de devenir tout ce qu’il veut et tout ce qu’il peut être. C’est le mépris pour la jeunesse, comme d’ailleurs pour le peuple, qui considère qu’il faut éternellement leur trouver et leur prodiguer des occupations pour leurs loisirs, des distractions, des jeux, du pain et du cirque. C’est l’inculture, pas la culture, qui a besoin en permanence d’être occupée, d’être distraite, d’être désennuyée. La culture, au contraire, c’est la claire conscience de la préciosité du temps. Qu’est-ce que c’est que tous ces grands benêts qu’on entend répéter à longueur de micro-trottoirs que là où ils sont ils n’y a rien à faire, que l’État ou la municipalité ne font rien pour les occuper ? Qu’est-ce que c’est qu’une jeunesse qui a besoin de l’État ou de la mairie pour se distraire ou s’accomplir, faute de quoi elle aura un merveilleux prétexte à la nocence, une bonne raison de tout casser, à commencer par les bibliothèques, les maisons des jeunes et de la culture, les salles de sport ? C’est une jeunesse laissée à l’abandon par un système d’éducation qui ne fonctionne plus, qui ne peut plus et qui ne sait plus apprendre aux enfants et aux adolescents la valeur du temps, c’est-à-dire la culture et la liberté.

Propos recueillis par Matthieu Falcone

Renaud Camus & parti de l’In-nocence, Abécédaire de l’In-nocence, 500 pages, éditions David Reinharc.

11 Comments

  1. L’agacement de Renaud Camus, dans le cas de l’affaire Guerlain, est très révélatrice de l’état d’esprit du courant qu’il représente.

    Les participants de son site passent leur temps à dénoncer « le racisme antiblanc », mais lorsque le vieux Guerlain déclare, à la télé publique, « j’ai travaillé comme un nègre, si tant est que les nègres aient jamais travaillé », ils se tortillent d’indignation à l’idée que des gens qu’ils voient comme « non français » osent protester et obtiennent gain de cause.

    La caractéristique principale de l’intellectuel de droite, c’est d’être constamment à l’affut de groupes ou d’individus qu’il peut accabler de son mépris, d’invoquer « la tradition » et de s’approprier les grands auteurs (morts) pour se glorifier lui-même.

    R. Camus et sa clique sont des nantis bavards et imbus d’eux-mêmes. Ils sont convaincus d’être vertueux, alors qu’ils sont surtout arrogants, précieux et vains.

    Ces singes savants qui s’imaginent que l’accumulation de connaissances livresques leur permet de s’ériger en juges absolus, se croient évidemment appelés à « sauver la culture et la civilisation » au nom du peuple français (le peuple, selon eux, se trouvant exclusivement dans les bibliothèques et les musées).

    La chasse au musulman est la seule cause qui ait jamais fait sortir ces gens-là de leur confort douillet. Et auparavant, R. Camus et ses amis s’occupaient exclusivement de leurs intérêts personnels.

    Pourquoi R. Camus se proclame-t-il soudain, à plus de soixante ans, « défenseur politique de la culture » alors qu’il ne s’est jamais engagé publiquement de sa vie, se contentant d’écrire ses livres et de profiter de son gras héritage de fils de grand bourgeois provincial. Son site est obsédé par l’information diffusée au quotidien dans les médias de masse et les faits divers.

    Mais ce n’était pas le cas avant : il s’en foutait. Où sont les prises de position publiques antérieures de R. Camus sur l’architecture moderne, l’éducation, la culture publicitaire, etc. avant 2005?

    Le seul, le véritable « projet politique » de toutes les « droites nationales » du monde, quelles qu’elles soient, c’est très simplement la défense systématique des propriétaires, le maintien de l’ordre établi, la poigne contre les couches sociales qui se situent tout en bas de l’échelle sociale et la répression. La défense de la tradition et des « grands hommes », c’est leur feuille de vigne.

    Il en a toujours été ainsi, et il n’y a aucune raison pour que cela change.

  2. Comment peut-on prendre au sérieux monsieur Camus ? A t-il fait une seule proposition concrète, pratique, réalisable,? Défent-il une seule prosition serieuse ? Comment ne pas éclater de rire devant ses propos du café du commerce de saint germain des près ? Quelles autres qualités revendique t-il pour prétendre à la présidence ? Quelle est son expérience ? Sa compétence ? En dehors de ses basses considérations resurgissent le mépris, la supériorité et il faut bien l’appeler ainsi le racisme qui éclate à chaque réflexion, la rancoeur, l’aigreur. On dirait du sous Le Pen.
    Combien sont-ils dans son parti ? Sont-ils si innocents que ça ? Ils ne doivent même pas avoir besoin d’une cabine téléphonique pour se réunir.
    A chaque élection arrivent des allumés, des illuminés, des charlatans qui polluent le débat avec leurs idées foireuses. Ce n’est même pas le parti d’en rire. C’est pitoyable. Il faut vraiment qu’il soit tombé sur le pire des interviewvers pour lui accorder le moindre crédit, prendre un quart de seconde au sérieux ce polichinelle pitoyable. Et que de complaisance, de lèche bottisme de M. Falco et aussi d’ignorance et de conscience politique, à l’exception de la servilité.
    Décidément le niveau de ce site décline de plus en plus.

  3. Ah, mais revoilà notre bon professeur de français, donneur de leçons professionnel. Je vous conseillerais, avant de cracher votre bile, de lire l’abécédaire de l’in-nocence, vous y trouveriez peut-être de quoi penser et réfléchir un peu. Vous verriez aussi que Renaud Camus a de vraies propositions, mais évidemment si vous cherchez la langue de bois bureaucratique et absconse des partis politiques traditionnels, vous risquez d’y être pour vos frais. Ce que propose Renaud Camus, avec quoi on peut être d’accord ou non, là n’est pas la question, est une vraie pensée politique, celle que les politiciens ont délaissée depuis trop longtemps, c’est-à-dire une réflexion sous-tendue par une culture et une conscience historique, non quelque programme qui se borne à régler les détails techniques au jour le jour comme on a pris l’habitude de le faire.
    Mais dans votre monde, il faut peut-être présenter son C.V. politique pour pouvoir prétendre faire quelque chose en France; il f

  4. il faut certainement être passé par tous les stades de la politique, celle dans laquelle on finit par se perdre.
    Enfin, je ne sais pas si c’est à moi que vous vous adressez sous le nom de « M. Falco » et de son lèche bottisme (sic) mais mon nom est Falcone. Vous pourriez au moins avoir la politesse d’écrire correctement un nom avant de le bafouer.
    Vraiment, vous me faites penser une fois de plus qu’il faut avoir beaucoup de persévérance et d’imagination pour aimer encore la littérature et la pensée dans ce pays où les professeurs en font si peu de cas. Et puisque ce site ne semble pas vous plaire, je vous proposerais d’aller faire un tour ailleurs, il y a des tas de forums sur le net où les gens aiment à s’insulter en chœur. A Culturemag on tente d’étayer ses propos quand on veut les soumettre aux autres, on ne vient pas déverser sa haine gratuitement, pour se procurer de maigres frissons, comme si ceux-ci pouvaient pallier la vacuité de notre vie. Cela s’appelle du respect, et aussi de l’in-nocence. Merci

  5. Cependant, très cher propriétaire de site, il est tout à fait possible d’aimer essentiellement avide de pouvoir et de notoriété, d’avoir l’esprit vil et l’âme noire, de vouloir dominer, et d’exprimer l’ignoble avec les formes les plus recherchées.

    Et on a vu souvent dans l’histoire des hommes puissants et cultivés, fumant cigare et portant veston de satin, ordonner à leurs tortionnaires – recrutés dans les « basses classes » – de faire le « travail » pour lequel ils les payaient.

  6. Je veux bien mais si c’est à Renaud Camus que vous faites référence en parlant « d’esprit vil et âme noire » exprimant « l’ignoble avec les formes les plus recherchées » qui ordonnerait à des « tortionnaires » de faire le travail qu’ils payent, j’ai peur que nous ne parlions pas de la même personne. Ou pas le même langage. En tout cas je ne me permettrais jamais de juger de la noirceur de l’âme de quelqu’un. Je suis certainement très rétrograde comparé à vous, mais j’en suis resté à cette parole de l’évangile : « avant de regarder la paille qui est dans l’œil de votre voisin, regardez plutôt la poutre qui est dans le vôtre. »

  7. C’était une remarque générale qui vise son raisonnement essentiel, basé sur une très vieille idée : l’érudition mènerait forcément à la sagesse et à la vertu.

    Hélas, l’histoire a montré que des érudits se sont mis fréquemment au service de tyrans sanguinaires, se sont laissés souvent mener par le bout du nez, par fatuité et désir de reconnaissance.

    Bref, ceux qui pensent appartenir à l’élite cultivée se placent hélas souvent du côté des bourreaux, mais surtout et en grand nombre, se comportent en courtisans empressés des groupes qu’ils considèrent comme les maîtres du monde et du grand échiquier politique.

    Ma réponse se fonde sur l’observation historique.

    Et votre réponse n’est pas sensée. C’est un banal cliché, que vous adressez à une personne que vous ne connaissez ni d’Ève d’Adam.

  8. Donc si je comprends bien, je suis dans le cliché mais, avec vos remarques générales, vous ne l’êtes pas du tout. C’est une manière de voir les choses.

  9. En effet, Bob, les érudits ont souvent servi les puissants.
    Mais historiquement les incultes aussi : ne désespérez donc pas, vous aurez aussi votre part de miettes.

  10. Monsieur Camus, lecteur de votre journal depuis quelques années (un exemplaire m’est decicacé), je ne partage pas vos idées mais vous lis avec plaisir. Ainsi, je vous connais un peu et crois comprendre que cette mascarade en politique fait partie d’une de vos nombreuses contradictions, que vous notez d’ailleurs. Ce n’est pas grave sur la forme, mais sur le fond, même quand on vous connaît, vous lire et vous entendre parler politique fait pitié. Comment font vos amis? Y voient-il là
    du jeu, simplement ?
    Écrivez un bon livre, ne rabâchez pas tant et j’irai à vos « signatures », vous êtes un homme de gauche, comme votre Pierre,
    Et stoppez cette lubie qui vous ridiculise, Pierre Bossu-Hosheim

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