Marie d’Agoult, une sublime amoureuse

/À l’occasion du bicentenaire de la naissance de Liszt, Ariane Charton, présentée comme une spécialiste du romantisme, publie aux éditions Kirographaires, Marie d’Agoult Une sublime amoureuse.

Marie d’Agoult fut la maîtresse, le grand amour de Liszt et la mère de ses enfants dont Cosima reste la plus célèbre, notamment pour avoir été la femme de Wagner.

Cet ouvrage, qui s’appuie sur de nombreux extraits de la correspondance entre Liszt et Marie d’Agoult et du journal intime de celle qui sera plus connue sous le nom de plume de Daniel Stern, brosse le portrait d’une femme passionnée, éperdument amoureuse du jeune prodige, de six ans son cadet. La vie de Marie d’Agoult, née Marie de Flavigny est, en un sens, édifiante. Issue d’une famille de noblesse désargentée, mariée assez jeune au comte Charles d’Agoult qui l’aimera sans jamais rien obtenir d’elle ni rien lui demander en retour, elle le quittera au bout de quelques années, emmenant avec elle les deux filles qu’ils ont eues pour fuir avec le très jeune Franz Liszt. N’écoutant que sa passion, Marie d’Agoult se soucie peu du scandale que sa fuite provoque dans sa famille et dans la société qu’elle fréquente.

Son amour est résolument passionnel, fusionnel et un brin tyrannique. C’est un amour très romantique qu’elle désire vivre avec le jeune pianiste, trouvant dans la solitude à deux, «  in alta solitudine », en Suisse puis en Italie, dans ces années de pèlerinage dont Liszt tirera certaines de ses plus belles pièces, le grand bonheur de sa vie.

«  Ma passion pour Franz, qui s’était encore exaltée dans la solitude de ces derniers mois, tenait du fanatisme » écrira-t-elle dans ses Mémoires.

Mais comme dans toutes ces amours romantiques qui, de Tristan et Yseult à Paul et Virginie en passant par Roméo et Juliette, la passion sublime, exclusive, échoue dans une impasse. Malgré leurs enfants, malgré l’amour vrai qui les unit jusqu’au bout, ceux que George Sand a qualifiés de « galériens de l’amour » et qui inspira à Balzac le couple de son roman Béatrix, ils ne parvinrent jamais à vivre longtemps ensemble. Liszt était trop préoccupé par sa carrière musicale, par les mondanités et les femmes, aimant constamment Marie d’un amour mystique mais désincarné, tandis que celle-ci se refusait obstinément, désespérément à n’aimer rien d’autre que lui et ne trouver goût à la vie qu’en son Liszt.

Cette histoire d’amour impossible rejoint le mythe tant, cherchant l’amour, ces deux grandes figures du romantisme, ces deux immenses caractères, l’un intrépide et libre, l’autre passionnée et sublime, se seront fait de mal en voulant à tout prix s’aimer sans jamais trouver d’accord.

La force du livre tient à sa riche documentation, au récit de la vie passionnelle de Marie d’Agoult qui confine au suicide ; sa faiblesse tient à son écriture un peu pauvre et aux généralités un peu grossières sur le caractère supposé des hommes et des femmes. Selon Ariane Charton, Liszt, avec son orgueil démesuré, son égoïsme et son très grand besoin d’indépendance serait l’image parfaite de l’homme tandis que Marie d’Agoult, dans sa soumission, son spleen, sa passion débordante et tyrannique serait celle de la femme.

On aurait aimé un peu plus de nuances dans ces jugements hâtifs. À trop vouloir faire de ce couple un mythe, l’auteur sombre par moments dans la caricature des types, ne donnant à lire l’amour que par le spectre de Liszt et Marie d’Agoult, lesquels atteignent justement le sublime par l’excès de leurs caractères et le déchaînement extraordinaire de leurs passions.

Ariane Charton, Marie d’Agoult Une sublime amoureuse, éditions Kirographaires, 300 pages, 18,95€.

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