Pourquoi faut-il encadrer les ventes du patrimoine monumental de l’État ?

Par Françoise Férat, sénateur*

/J’ai récemment appris par voie de presse que l’État compte mettre en vente plusieurs de ses hôtels particuliers. En effet, l’hôtel de Clermont, l’hôtel de Broglie, l’hôtel de Vogüé et l’hôtel Mailly-Nesle sont concernés et devraient être mis aux enchères en mars.

Ces ventes pourraient certes rapporter près de 250 millions d’euros. En ces temps de crise particulièrement difficiles, où il nous faut faire des économies, la somme paraît « alléchante ».

Cependant, on parle ici de la vente de notre patrimoine et cela sans aucune garantie. Nous sommes bien loin de l’esprit de la Proposition de loi relative au Patrimoine monumental de l’État, dont je suis l’auteur.
Ce texte, malheureusement dénaturé lors de sa seconde lecture au Sénat, aurait pu permettre d’encadrer ce type de ventes, non pour les empêcher, mais afin de garantir le respect de leur caractère culturel.

Il s’agissait de réaffirmer l’importance de notre patrimoine monumental : son utilisation doit être respectueuse de son histoire, de son architecture, et de son rôle au regard de la mission de service public culturel. Il repose sur la mise en œuvre d’un principe dit de précaution, qui intervient à chaque étape du processus décisionnel applicable au patrimoine monumental de l’État.

Je ne peux que regretter que le gouvernement ne se positionne pas sur cette ligne, dans l’unique but de trouver de l’argent.
Comme le rappelait René Rémond, « certains monuments historiques appartenant à l’État incarnent la mémoire de la nation ou constituent un élément du patrimoine européen ou universel. Ce sont donc des éléments constitutifs de notre identité, de notre histoire. Leur protection doit être un impératif pour que soit transmis aux générations futures ce patrimoine inaliénable garant de la mémoire collective ».

L’enjeu réside aujourd’hui dans la définition d’outils et de principes qui permettront à l’État de mener une politique patrimoniale cohérente et exemplaire.
Il s’agit de mettre en place une analyse objective en amont de toute décision de cession d’un monument historique et de la prise en compte de la notion de son utilisation culturelle.


*Françoise Férat est sénateur de la Marne depuis le 23 septembre 2011, membre du groupe Union centriste et républicaine. Elle est membre de la Commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat depuis cette date. Elle a été le rapporteur du groupe de travail pour analyser le rôle du Centre des monuments nationaux et ses perspectives d’avenir dans le cadre d’une éventuelle relance des transferts de monuments historiques de l’État. Elle est l’auteur et le rapporteur de la proposition de loi relative au patrimoine monumental de l’État.

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.