Sam Szafran, 50 ans d’un art caché dévoilé à la Fondation Gianadda

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Comme l’a si bien exprimé la critique et graveur Aude de Kerros, nous avons vécu des décennies « d’art caché ». L’arbre de l’Art dit « Contemporain » cachant la forêt de l’Art caché, ou plutôt de l’Art tout court.
Parmi ces artistes discrets, tenaces, dans le secret de leur atelier, Sam Szafran, qui fête ses 50 ans de peinture. Une œuvre inclassable et inconnue du grand public exposée à la Fondation Gianadda qui avait organisé une première rétrospective en 1999.

Ce fils d’émigrés juifs polonais né en 1934, orphelin dès le début de la guerre, fut marqué au fer rouge de la seconde Guerre Mondiale.
Après un exil en Australie, il vivote mais mène la joyeuse vie de bohème du Montparnasse d’après –guerre. Artiste autodidacte, il prend tout de même des cours de dessin et rencontre des artistes aussi variés que Django Rheinardt, Diego Giacometti, Nicolas de Staël…

Il se revendique comme un « néo-classique » en citant ses techniques : fiel de bœuf, papiers de soir, pastels…

Après une ouverture vers le monde de l’abstraction, il opère un tournant en abandonnant la peinture à huile pour se tourner vers les désormais mythiques pastels dont il relancera presque l’économie à lui tout seul, et qui deviendront instruments aussi bien que sujets de son œuvre. Sa collection de pastels aujourd’hui est d’ailleurs un cas unique !

En 1965, se tient sa première exposition personnelle, suivie de celle de 1970 avec la série de représentations de ses « Ateliers ». Une variation sur un thème qui portera ensuite sur les « Imprimeries ».

Il passera très vite ensuite à ce qui fait sans doute sa notoriété et son étrange singularité : ces « Escaliers » vertigineux, géométriques, labyrinthiques, qui viennent chercher leur origine dans une terreur de Sam Zafran, autre chapitre douloureux de l’enfance, quand son oncle le suspendit dans le vide, au-dessus d’un escalier…
Un esprit d’escalier que l’artiste cultive jusqu’au vertige et qui le propulse vers la ville et la nature, thèmes récurrents, qu’il finit par embrasser en un tout organique.
/Artiste de la maîtrise, longtemps sur le métier, Szafran remet son ouvrage, jusqu’à passer dix ans sur une toile. D’où la sensation d’achèvement et d’œuvre organique. Dès lors, on ne s’étonne plus en découvrant des toiles telle que cette œuvre représentant des escaliers avec des vues de Paris (d’autant plus énigmatique qu’elle est sans titre) dont le détail de la ville avec le travail des lignes en un miroir déformant dégage une puissante impression…
La nature foisonnante, quant à elle, dessinée avec minutie repousse le vide avec  une force quasi-obsessionnelle (toile représentée à droite).

À Martigny, la Fondation avait déjà inauguré  sur la façade de la salle Belvédère une œuvre monumentale composée de deux céramiques que l’artiste a eu quelque difficulté à concevoir, changeant soudain d’échelle : 220 carreaux pour 7 mètres 50 de long !

Une œuvre-monde qui donne à voir la diversité de l’instant à travers la distorsion du temps, la superposition des séquences, tout en étant structurée. Une symphonie à découvrir à la Fondation Gianadda.

Pratique :

Sam Szafran, 50 ans de peinture
Jusqu’au 16 juin
Fondation Gianadda
Rue du Forum 59
1920 Martigny
Suisse
Tél : +41 27 722 39 78

www.gianadda.ch
Tous les jours de 10 à 18h.

Tarifs de 8, 50€ à 15€.

Catalogue de l’exposition : Sam Szafran, 50 ans de peinture, Fondation Pierre Gianadda.

Sam Szafran, Entretien avec Alain Veinstein, Flammarion, 26€.

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