Destruction d’églises : cachez ce XIXème siècle que je ne saurais voir

/À la fois révolutionnaire et réactionnaire, international et nationaliste ou régionaliste, républicain et royaliste, légitimiste, orléaniste ou bonapartiste, libéral ou autoritaire, temps de la modernité et victime des néo – tour à tour classique, gothique ou byzantin, quand il ne sombre pas dans l’éclectisme – le XIXe siècle incarne, aux yeux de la plupart d’entre nous, le pire de l’Histoire et de la Culture française. Ses églises aussi ! Aujourd’hui, on les détruit.

Depuis le 1er janvier 2013, trois églises de la fin du XIXe siècle ont été détruites dans notre pays.
La première, Saint-Jacques d’Abbeville, aux allures de cathédrale, avait le malheur d’être trop récente pour avoir accueilli Jeanne. Aux yeux de nos élites locales, bercées de la haine du siècle des paradoxes, peu importe au fond que l’église soit la plus belle de la ville dont elle est l’emblème, peu importe aussi que des dizaines de milliers d’habitants s’y soient mariés, ou y aient été baptisés ou inhumés ! Les habitants seront ravis d’effacer cette verrue, erreur de l’Histoire, en déboursant un demi-million pour la démolition et plus de trois autres millions pour aménager un square public ; quand on aime, on ne compte pas.

Autre province, même punition : les églises d’Anjou, pour beaucoup reconstruites après les guerres de Vendée, incarnent trop haut la grandeur triomphante d’un siècle de foi. De toute façon, peu importe les souvenirs ou la fidélité à nos arrière-grands-parents qui ont donné leurs économies pour embellir leur village, là encore, elles n’étaient pas classées. Pour ces élus, seul un classement fait le patrimoine. Pour eux, un restaurant non-étoilé au Michelin n’est sans doute pas un restaurant !

/De toute façon, ces églises tombent toutes seules. D’une qualité légendairement pitoyable, ces églises sont de véritables dangers pour les habitants… Ainsi, après à peine vingt ans sans aucun entretien, ouvert aux quatre vents, sans chauffage, alors que le moindre trou dans la toiture est laissé libre de s’agrandir, ne voit-on pas l’humidité faire son apparition, les fissures s’agrandir ou les plafonds tomber ? Heureusement, consciencieux et informés, ces élus, au lieu de naïvement dépenser quelques milliers d’euros chaque année – comme le ferait tout bon père de famille – préfèrent économiser, pour dépenser des millions à construire une église neuve.

À l’instar de la recette du clafoutis, transmise de mères en filles depuis 1898, qui encore toujours saliver les papilles rassurées par ces saveurs qui les bercent depuis toujours, le patrimoine, c’est un trait d’union entre les hommes de toutes les époques. L’incarnation dans la pierre de notre histoire commune. Au nom de ce principe essentiel, nous, Français, condamnons les vandales qui détruisent le patrimoine qui les dérange, de la Roumanie de Ceaucescu à l’Afghanistan.

Maxime Cumunel
Observatoire du patrimoine religieux
www.patrimoine-religieux.fr

Soyez le premier à commenter

Poster un Commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.