Où va l’argent de la dette ?

Par Christine Sourgins*

/Un artiste contemporain marseillais Abraham Poincheval,  a passé une semaine sous terre à Tours, installé dans une buse en béton de 1,80 mètre de haut sur 1 mètre de large, l’entrée ayant été bouchée avec une pierre de 3 tonnes. Cette performance artistique a coûté 30 000 euros d’argent public. Une affaire révélée par la presse et «  l’Observatoire des subventions » de Contribuables Associés.

Le président de l’association Eternal Network, qui a financé ce projet, se défend d’avoir utilisé de l’argent public : il  explique que les subventions servent au fonctionnement annuel de son association, qui… organise des expositions et accompagne des commandes ! Tandis que cette performance artistique serait, d’après lui,  financée par l’épargne de l’association et par des dons. Oui mais d’où vient l’épargne de l’association ?
Les contribuables apprécieront ces sophismes. Sur son site Eternal Gallery annonce fièrement bénéficier (pour attirer les dons ?) du soutien de la ville de Tours, de la DRAC Centre, de la région Centre et… du Crédit Mutuel.

Le Parisien précise : l’artiste équipé d’une caméra va filmer cette expérience hors norme et réaliser une sculpture à partir d’un os de bœuf.
Pour survivre, le strict nécessaire, une lampe, des livres… »Un voyage intérieur avec l’envie d’explorer ses limites », dit ce journal, « une aventure verticale entre les cieux et le monde souterrain » dit un autre. Pourquoi pas ?
Là où le bât blesse c’est lorsqu’un individu entend faire financer par la population ses lubies personnelles (en l’occurrence des expériences de survie qui pour être bénéfiques à la collectivité devraient être accompagnées d’un suivi médical et scientifique : n’est pas Michel Siffre qui veut ). «  On perd la notion du temps, tout se mélange, jour et nuit, sommeil et réalité, avec même des hallucinations.» dit l’artiste qui semble s’en délecter. Veut-il ainsi relativiser le calvaire des victimes des tremblements de terre ou des prisonniers, enfermés dans des conditions « hors normes » ?

Poincheval, un artiste d’AC, a un concept, « l’exploration », qu’il décline et use jusqu’à l’inepte…l’art conceptuel tourne vite en rond. Ainsi la performance du  » gyrovague » : installé à bord d’un habitacle cylindrique servant à la fois de véhicule et de lieu de vie, Abraham Poincheval arpente le nord des Alpes pendant un mois de chaque saison.
Des rencontres sont organisées dans les villages proches ; « sous forme de veillées, de récits de voyage, tel un ermite qui retrouverait pour un temps la vie en communauté. » Ah, il existe donc des villages français, sans télé, sans radio, sans portable, sans internet, sans aucun touriste qui circule, des autochtones tellement isolés qu’il serait vital pour eux qu’on leur fit charitablement une veillée ? D’où l’urgence d’un financement public ?
Encore un fois, c’est moins la démarche qui choque que la présence d’argent public.  Or l’équipée du Gyrovague relève du projet VIAPAC,  porté par le Conseil général des Alpes de Haute-Provence, la Réserve géologique de Haute-Provence,  la Région Piémont, en collaboration avec le Musée Gassendi.

En 2001, avec un comparse, Poincheval tentait de retrouver les conditions de vie au Paléolithique en vivant en autarcie, sur l’île du Frioul, comme si les archéologues ne pratiquaient pas déjà une archéologie expérimentale.  En 2006, ils installent un camp d’altitude au sommet d’un building  en Corée, ils seront évacués par hélicoptère (voilà qui est peu écologique : à quand une taxe carbone sur l’AC qui use  la planète ?).
En 2008, ils s’enferment dans une cage infestée de moustiques, en slip et armés d’élastiques. Ou encore, ils creusent  la terre, en ligne droite, vingt jours durant, en rebouchant leur tunnel au fur et à mesure, avant réapparition à la surface. En subventionnant ses démarches farfelues, les élus et l’administration ne retirent-ils pas aux vrais explorateurs ou chercheurs de quoi travailler ?

« Gagner de l’argent est un art » disait Andy Warhol, et l’art dit contemporain, l’AC, s’y entend : avec des projets nombrilistes, autistiques sous couvert de convivialité factice, des « expériences » qui sont jeux pour bobos, arriver à trouver du financement public auprès d’organismes qui vivent de la vache à lait du contribuable, voilà cet art.  Et ce, sans états d’âme, avec même un soupçon d’arrogance, genre « puisque je suis artiste tout m’est du », le tout  dans une Europe endettée jusqu’au cou : un chef d’œuvre non ?
La seule question est : jusqu’à quand le public acceptera-t-il d’être l’otage et le banquier du système… ?

À suivre…

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