Chroniques d’une Sardaigne amère et aimée

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Quand on a fréquenté, comme le signataire de ces Chroniques d’une Sardaigne amère et aimée, les autonomistes, les séparatistes, les communistes, les maoïstes, les murales, bien avant qu’Ernst Jünger ne s’établisse à Villasimius, on ne s’étonnera pas que les Sardes se sentent dépossédés, peu à peu, de leur spécificité, de leurs mythes, de leurs rites, de leur carnaval, de leurs antiques cérémonies païennes.

Les Sardes se revendiquent vaincus de l’Histoire. Ils savent que le danger vient de la mer et pour oublier le démon de la révolution industrielle qui s’est  emparé de l’île pour y installer le Dieu Pétrole, sans avoir créé ni richesse, ni travail, ni culture, il leur reste le rire sardonique. Il permet de blasphémer, d’ouvrir grande leur gueule face à la mort, de boire, de s’enivrer, de hurler, d’aboyer, de cracher à la face d’un mannequin installé sur la place du village. Appelons ça la nuit du couteau court, le plaisir de larder l’épouvantail, de le percer jusqu’à sa ruine.

Autre tradition populaire, parler avec un mort, créer avec lui un lien pour l’éternité.
Francesco Masala (1916-2007) écrit que « toutes les fois que dans la vie d’un peuple apparaît le problème de la langue, cela signifie que sont en train d’émerger à la surface tous les problèmes politiques et économiques ».

Le Sarde n’a peur ni de la solitude, ni du silence qui permet d’entendre les voix de la nature. On est loin de ce qu’écrivait Joseph Gorani (1740-1819) rêvant d’un royaume florissant pour la Sardaigne.

Je voudrais ici remercier son ami Claude Schmitt, le traducteur, l’introducteur, dirais-je, de la littérature sarde en France, et dont Le voyage en Sardaigne (éditions du Dauphin Vert) fait autorité.

Alfred Eibel

 

Le rire sardonique, Chroniques d’une Sardaigne amère et aimée, de Francesco Masala.
L’Harmattan, 94 p.12 €.

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