Lectures à Grande Vitesse : rentrée littéraire… ou pas

CultureMag, notre rentrée littéraire…. A suivre.

Mes fréquents déplacements en train présentent cet avantage délicieux de m’offrir la liberté de lire à ma guise. Je suis certes environné de voisins tapotant méthodiquement sur des claviers de formes variées, en fixant sur moi des regards inexpressifs de lémuriens sous Prozac. Sans doute me prennent-ils pour une espèce en voie de disparition, un nostalgique de l’ancien temps où le papier régnait en maître.

C’est que je suis de ces gens qui aiment encore tourner la page. Au menu de mon aller-retour de cette fin de semaine, un vieux de la vieille et deux perdreaux de l’année. Honneur au plus ancien, la Confession du pécheur justifié, de James Hogg (L’Imaginaire, Gallimard), qui fit l’admiration d’André Gide en 1944, du temps où il était encore à Alger. Voilà un bijou à mettre devant tous les yeux, un sommet de la littérature écossaise, porté par une description très fine du Diable en personne. J’y vois une source d’inspiration pour l’excellent Maître de Ballantrae de Robert-Louis Stevenson. Ah, on savait diablement bien écrire au dix-neuvième siècle !

Mais rien n’empêche de se laisser tenter par Pervers et par 37, étoiles filantes

Le hors d’œuvre ayant été généreux, il est permis d’attaquer des productions plus récentes, faites, c’est leur première excuse, pour un public peut-être moins exigeant.


Pervers (Grasset) est porté sur les fonts baptismaux des premiers romans par une grande figure de l’édition française, Jean-Luc Barré, également biographe réputé, deux fois récompensé par le prix de la biographie de l’Académie française.
Cela justifie certainement quelques piques bien senties sur l’état de l’édition française, « sur les derniers trafics en cours dans « la cuisine des prix », la corruption désormais avérée d’un juré éminent (on comprend qu’il ne s’agit pas de celui décernant le prix de la biographie susvisé) « déjà vendu avant d’être acheté », les frasques sexuelles d’un éditorialiste renommé,  « professeur de vertu dans le civil, partouzeur toutes catégories dans le privé… ».

La négritude en prend aussi pour son compte. Faut-il vraiment ainsi cracher dans une soupe à la grimace ? Le style est pourtant enlevé, vif mais l’intrigue me laisse un peu sur ma faim. Il est vrai que cette perversité, un beau sujet, fait pâle figure  quand on vient de quitter le Démon. Pour le retour, un vieux rêve, casser la figure à Jean-Paul Sartre.
C’est l’idée qui ouvre puis soutient 37, étoiles filantes de Jérôme Attal (Robert Laffont).


Un mot malheureux de notre philosophe, «  Il lui est ENFIN arrivé quelque chose », fâche la personne ainsi visée qui n’est autre qu’Alberto Giacometti. Et nous voilà embarqués dans une amusante promenade dans le Paris d’avant-guerre mondiale numéro deux, où l’on croise les figures de François Mauriac ou d’Anaïs Nin. Le duel aura-t-il lieu ? Paris offre d’autres tentations, jusqu’à un réveillon merveilleux qui mettra en présence les deux amis.
Œil pour œil ? Nous sommes quand même loin de notre Confession, n’est pas le Diable qui veut. Les vaches ont l’air de mon avis, l’ennui guette parfois jusqu’aux étoiles filantes.


Deux paquets de notre nouvelle lessive contre votre ancien baril ? Pas sûr, mais rien n’empêche de se laisser tenter par Pervers et par 37, étoiles filantes.

 

François Jonquères

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