La Covid et le Théâtre

Depuis maintenant presque deux ans, le théâtre, plus encore que les autres arts, souffre de la crise générée par le Coronavirus. Rien évidemment de surprenant à cela même si on peut s’étonner de la passivité des gens de théâtre.

Que la peur ait gagné la population au point de ne plus se rendre dans les salles de spectacles, a fortiori quand on la lui interdisait, est compréhensible. Pas une télévision, pas un journal, pas une radio qui ne nourrissait se sentiment de peur.

En revanche, on ne peut que s’interroger sur le choix politique de nos gouvernants qui partageait l’activité des Français entre utile et non-utile, la culture et le théâtre se situant bien évidemment dans cette deuxième catégorie.

Autre interrogation : la collaboration de la grande majorité des artistes à ces décisions gouvernementales. On a pu voir ainsi des directeurs de théâtre banaliser l’obligation faite aux spectateurs de porter le masque (j’ai même vu des spectacles avec des comédiens qui jouaient avec un masque sur le visage !) comme si ce n’était pas l’essence même du théâtre (qui est communion) qui, là, était atteinte.
Pire encore, on a demandé à ces mêmes directeurs de jouer les auxiliaires de police en vérifiant les passe sanitaires comme si les non-vaccinés étaient interdits de grandes œuvres. Ce qui était impensable de la part d’artistes prompts à la rébellion sinon à la révolte (on le voit quand il s’agit de leur intermittence !) est devenu normal.

Aujourd’hui rares sont les théâtres qui n’appliquent pas cette mesure liberticide (et quoi que l’on pense, par ailleurs, de l’efficacité du vaccin). C’est totalement incroyable : le spectateur est fliqué exactement comme il était fliqué dans les pays de l’Est, avant la chute du mur, quand il se rendait au théâtre. Résultat : une chute de fréquentation qui touche particulièrement les spectacles ambitieux, là où les spectateurs sont de meilleure qualité ; et, surtout, un rapport au théâtre étrangement changé : spectateurs et acteurs se retrouvant les uns et les autres dans leur bulle.

Ainsi masqué, le spectateur est, en effet, comme au cinéma, passif devant un écran. Certes, cela n’empêche pas certains rires, certaines réactions mais c’est la fonction même de la dimension cathartique du théâtre qui est atteinte, le spectateur ne remplissant plus que partiellement son travail de spectateur actif et participant corps et âme avec l’acteur-personnage.
On voit, par cela même, à quel point le théâtre se réduit à sa fonction culturelle et utilitaire. La communion acteur-spectateur n’existe plus. En revanche, le spectateur est comme à un cour magistral : il engrange des connaissances et du plaisir. Certains sans doute trouveront que c’est déjà pas mal, pas moi !

Que nos gouvernants ne comprennent rien à l’essence du théâtre, et qu’ils prennent en conséquence ce type de réflexion à la légère, n’a effectivement rien de surprenant. Mais de la part des gens de théâtre, c’est assez stupéfiant !

 

Jean-Luc Jeener

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