Garçon, l’attrition !

De Michel Déon, j’ai retenu nombre de sages conseils, le principal étant de toujours tout faire pour favoriser l’éclosion de jeunes talents. Frédéric Bécourt mérite, à ce titre, une série de coups de pouce et la quatrième de couverture de son premier roman, Attrition (AEthalidès) l’annonce déjà fièrement parmi « la vague montante des romanciers antimodernes », un déferlement autrement plus sympathique que les tsunamis viraux qui inondent nos vies depuis maintenant deux longues années.

L’ambiance de son premier opus est pourtant glauque à souhaits, on y suit les traces de Vincent, un quadragénaire parisien dont le quotidien volera bientôt en éclats, entre divorce et meurtre de son ex-épouse, déprime professionnelle et exode campagnard.
Dans cette traversée d’un désert pavé de mauvaises intentions et qui finira par le laisser sur le sable, quelques âmes charitables le soutiennent, souvent malgré lui, c’est d’abord l’affection attendrissante de ses parents, des instituteurs à l’ancienne,  le dévouement presque sans limite de Mathilde, jusqu’à un Berbère pas si pépère, mais, nous ne le savons que trop, nul n’échappe à son destin.

Des références à Cioran ou à Bernanos apportent du sens à ces péripéties vagabondes et quelques réflexions bien senties signent une maturité intéressante : « La France aujourd’hui, c’est une rame de métro dans laquelle s’entassent toutes sortes de communautés, ethniques, religieuses, culturelles ou politiques. On se frôle, on s’observe, mais on ne se regarde pas. C’est chacun sa merde. Il n’y a pas de place pour un projet collectif » ou encore « la situation actuelle n’est que la somme de nos petits renoncements minables depuis trente ans. »

Le diagnostic est sévère mais bon, nous attendons désormais l’ordonnance. Craindre des remèdes de chevaux. Eh oui, à force, il fallait s’y attendre, l’attrition sera corsée.

                                                                                                                                                                                                                                  François Jonquères

 

 

 Frédéric Bécourt, Attrition (AEthalidès)

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