Jean-Claude Michéa, admirable auteur de L’enseignement de l’ignorance, d’Orwell anarchiste tory, d’Impasse Adam Smith et de L’empire du moindre mal, est un homme qui tombe toujours à pic, mais combien plus en ces temps de crise de l’économie libérale, cette crise qu’aucun des régimes bananiers qui nous gouvernent n’avait su prévoir, quand elle était inscrite dans les fondements même du système.
L’acharnement que les ultra-néo-libéraux mettent à défendre les vertus de leur idéologie, censée être capable de se réformer toute seule, n’est pas sans rappeler l’aveuglement des sectateurs de l’économie communiste, qui les tint jusqu’à ce que certain mur se fissurant les forçât à enfin dessiller.
Le travail précieux du philosophe Michéa à travers tous ses livres consiste à démontrer que les racines du libéralisme et de la gauche sont communes, c’est-à-dire progressistes. Que l’homme, depuis l’époque moderne, a été conçu comme perfectible par des moyens techniques, donc économiques. Que l’on en a déduit qu’il fallait toujours sacrifier plus à ce Moloch supposé améliorer l’humaine condition, jusqu’à atteindre l’horreur financière contemporaine, où non seulement l’économie « réelle » est suspendue aux oracles des traders, ces enfants qui jouent avec les cours de bourse comme d’autres avec les monstres de leur Wii, mais où encore toute existence est inféodée aux besoins de la croissance infinie. Dans ce Retour sur la question libérale, le néophyte trouvera l’introduction idéale à une pensée libre qui, quoiqu’on puisse discuter de ses solutions, a cet incomparable avantage de révéler le noeud de l’intrigue.
La double pensée : retour sur la question libérale, de Jean-Claude Michéa, Champs Flammarion, 2008, 274 pages, 9 euros
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