La zonzon : de l’estrade aux barreaux

/La Zonzon, un premier roman talentueux qui a reçu le Prix Georges Brassens.

Lazare Vilain est prof de philo dans « l’Ed’ Nat’ ». Mais professionnellement, il n’arrive plus à « supporter l’entreducutage très glandilleux des corps d’inspection », l’immobilisme de ce milieu et les pesanteurs administratives. Sentimentalement, il sort avec Vanessa , qui « est bravette, mais fatigante », et ses « fignoleries de braguette et d’agapes » vont l’indisposant.

Tout les ingrédients sont réunis pour que le bonhomme s’emmerde et en ait marre de cette vie proprette : il veut de la déglingue ! C’est pourquoi, lorsqu’une opportunité se présente à lui d’aller enseigner Socrate à des taulards, en milieu carcéral, il fonce. Et s’il arrive à leur donner goût à sa noble discipline, c’est en toute réciprocité qu’il adopte leurs codes… et prend part à leurs plus louches combines. Il se sent renaître, et son amour pour Leila ne fait que parachever ce sentiment.
En lieu et place de gamins qui ne connaissent de la vie que ce qu’ils en lisent dans les bouquins, des gars qui en ont vu et fait bien plus que les 400 coups.

Il s’immergera dans ce monde où la philo n’allait jamais : la zonzon (la prison, en argot). C’est en étant là qu’il s’évade d’un quotidien plan-plan, et paradoxalement, qu’il se sentira le plus libre.

Un rare sens de la formule

Si la critique – et même le dossier de presse – s’épanche  sur un style argotique et plein de néologismes, elle en oublie bien trop facilement la qualité du verbe, qui ne saurait souffrir aucune comparaison. C’est pourquoi nous n’aurons pas ici l’outrecuidance qu’ont eu certain de le placer entre Audiard et Dard. D’ailleurs, réduire le style de Guyard à un argot inaccessible pourrait détourner certains puristes de « La Zonzon ». Rassurons ceux-ci : l’auteur fait preuve d’un rare sens de la formule, et sait manier la plume avec maestria.
Une réserve, toutefois : l’émergence d’une histoire d’amour un peu gnan-gnan tend à affadir un récit qui jusque-là, sentait bon la sueur et la testostérone.

Mais si, comme le disait Bukowski, « Les hôpitaux, les prisons… Telles sont les universités de la vie », celui qui fait entrer la philo dans les hôpitaux psychiatriques et les centres de détention mérite bien qu’on l’appelle Monsieur Guyard.

Maxime Jacquet.

La Zonzon, Alain Guyard. Éditions du Dilettante, 286 pages, 20 euros.

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