Arnold Schönberg : Peindre l’âme

/Si Arnold Schönberg (1874-1951) avait refusé toutes propositions d’exposition de son œuvre picturale produite essentiellement entre 1906 et 1911, c’est parce qu’il qualifiait cette activité de mineure.

En effet, sa peinture est mineure puisqu’il n’y a pas consacré son intérêt premier et que sa préférence allait à la musique, art non figuratif auquel il vouait sa virtuosité créatrice et ses pensées théoriques. Mais en parcourant les salles du Musée d’art et d’histoire du Judaïsme, on ne peut admettre ce qualificatif de « mineure », tant les portraits hallucinés, les « regards », ou « visions » comme les qualifiaient Kandisky, dévoilent à nos yeux le génie d’un artiste total. Sa musique résonne dans les salles où l’on peut voir tourner les films de son opéra Moses und Aron, et ses peintures d’âmes aux traits parfois grossiers, aux crânes difformes mais où éclate une profondeur dure et glaciale.

Les visages de folie inspirés par Edvard Munch, ceux de sa famille, de ses proches, hantés par la tromperie de sa femme, le suicide du jeune Gerstl, les yeux cavés, les couleurs parfois désertiques où gît un vert-brun amer, comme sur le portrait de Alexander Zemlinsky. Chaque visage reçoit l’empreinte de sa propre vie, Malher apparaît dans un cauchemar, sa face figée dans un fond de la même couleur, et ses tableaux sont accompagnés de peintures de ses contemporains de Gerstl à Kandisky qui témoignent de cet esprit créateur fécondé par une recherche idéale de l’art et un désir d’accomplir l’œuvre qui synthétiserait tous les arts, le Gesamkunstwerk.

Outre le qualificatif de trouvère du dodécaphonisme, c’est Schönberg tel qu’il était, intégralement, que le musée a essayé de rendre à la vie jusque dans ses drôleries créatives et ses peintures du Christ, dans ses Psaumes Modernes et ses Paysages, liant ses œuvres par un goût de chair quasi liquide dont s’extrait un œil palpitant, et c’est à son ami Kandisky qu’il faut donner la parole de la consécration : « Une vision est, sur une toute petite toile, seulement une tête. Les yeux entourés seulement de rouge, sont parlants. La peinture schoenbergienne, j’aimerais l’appeler la peinture du seulement. »

Baudouin de Guillebon

Pratique :

Musée d’art et d’histoire du Judaïsme

Jusqu’au dimanche 29 janvier 2017
71, rue du Temple, 75003 Paris
Du mardi au vendredi : 11 h à 18 h
Samedi et dimanche : 10 h à 18 h
Plein tarif : 8 €
Tarif réduit : 5 € (18-25 ans, familles nombreuses, Amis du Louvre)

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