L’exposition Versailles Revival s’impose d’emblée comme un des événements de la fin d’année. Le domaine de Versailles nous avait habitué à de beaux moments mais ici un véritable enchantement nous gagne.
Peintures, photographies, films témoignent de ce « revival » au château, jusqu’au 15 mars 2020.
350 œuvres d’art constituent cette magnifique exposition baptisée Versailles Revival. Si le terme anglais choque un peu dans ce temple de la grande Histoire et du goût français, la visite est un ravissement !
Dès les lendemains de la triste Révolution, l’engouement pour ce haut lieu de la monarchie française reprit de plus belle avec d’ardents protecteurs des lieux.
« Versailles revival » raconte de manière éblouissante cette passion qui n’a jamais failli pour le Domaine de Versailles et qui étreint les visiteurs bien au-delà de la France.
Il fut un temps où Versailles fut une belle endormie. Un lieu vaguement ennuyeux hanté par des inconditionnels soucieux de le chérir et de le transmettre, et transformé en morne musée par Louis-Philippe.
Dès le Second Empire, la fascination de l’Impératrice Eugénie pour Marie-Antoinette permit de lancer les prémisses cette inspiration versaillaise.
Le déclic
Mais quel fut le déclic qui lui fit traverser les frontières et voir chaque jour des milliers de visiteurs en file indienne braver les éléments pendant des heures afin
de vivre un moment le « rêve versaillais » et la vie de château ?
A la fin du XIXème siècle, alors que la royauté s’éloigne peu à peu, la nostalgie s’installe.
Et un électro-choc réveillera définitivement les Français : la proclamation de l’Empire allemand en 1870 dans la Galerie des glaces, après Sedan !
La famille Bismarck a d’ailleurs prêté le tableau d’Anton von Werner représentant cette scène humiliante..
Comme le souligne Laurent Salomé, commissaire de l’exposition :
« L’engouement pour le XVIIIe siècle se développe : une floraison très spectaculaire, où on puise joyeusement dans la vie de cour.
Marie-Antoinette, d’horrible Autrichienne, devient une idole à la Belle Epoque. Louis XIV devient populaire, personnage de livres pour enfants.
Tout le monde s’amuse à jouer à la cour de Louis XIV ».
L’amoureux inconditionnel du château de Versailles, Pierre de Nolhac, directeur de 1892 à 1920, dont on peut admirer un émouvant portrait de l’homme à son bureau, sera le maître d’œuvre de la renaissance des lieux. Il parviendra à convaincre la République de les remeubler comme sous l’Ancien Régime et attirera à Versailles tout son réseau de relations politiques et intellectuelles.
Tout est dit de sa dévorante passion ici : « Ce qu’il y a de plus beau à Paris, c’est Versailles ! » Pierre de Nolhac.
Dans le landerneau littéraire et culturel du XIXème siècle, les lieux fascinent romantiques et dandys.
Proust est inspiré par « Versailles, grand nom rouillé et doux, royal cimetière de feuillages, de vastes eaux et de marbres, lieu véritablement aristocratique et démoralisant, où ne nous trouble même pas le remords que la vie de tant d’ouvriers n’y ait servi qu’à affiner et qu’à élargir moins les joies d’un autre temps que les mélancolies du nôtre ».
L’écrivain dandy Robert de Montesquiou alimente dans le Paris mondain la passion pour ce lieu que, dit-il, « la peinture reproduit, la poésie célèbre, dont la musique s’inspire » tandis qu’il inspire à Maurice Barrès de mélancoliques réflexions.
Versailles inspiration sans fin
Le modèle versaillais recommence à inspirer l’Europe comme au XVIIIe siècle, dans l’art et dans l’architecture, étendant cette fois sa fascination outre-Atlantique.
D’incroyables fêtes font revivre Trianon et Sarah Bernhardt se produit au château à l’occasion de la visite du tsar Nicolas II en 1896. De Louis II de Bavière à Gloria Vanderbilt, de la comtesse Greffülhe à Gabriel Fauré, tout un monde brillant se réunit autour de ce symbole du faste français.
L’essor de la peinture historiciste permet la multiplicité des représentations du château, de ses jardins… jusqu’aux représentations symbolistes ou aux interprétations vibrantes des post-impressionnistes.
La grande surprise de ce parcours tiendra surtout à la découverte d’une facette méconnue du peintre russe Alexandre Benoist avec une série de toiles qui rappellent l’intérêt des Russes pour le domaine de Versailles depuis la visite du tsar en 1886.
Avec Fête de nuit à Versailles, le peintre Gaston La Touche montre un rêve romantique : un couple d’amoureux en barque de nuit lors des Grandes Eaux.
Versailles séduit aussi les photographes comme Eugène Atget, Edward Steichen et Man Ray.
L’engouement s’étend tous azimuts : du « Versailles des mers », le paquebot France, avec son salon Louis XIV, aux Versailles bavarois que sont les châteaux de Louis II, ou au Versailles américain avec notamment la villa d’Alva Vanderbilt à Newport, les exemples sont légions.
Le milliardaire américain John D. Rockefeller, quant à lui, finance largement la restauration du château.
Les grandes eaux, qui n’ont jamais perdu de leur attrait au cours du XIXe siècle, deviennent une destination pour les foules
Dès 1937, le « revival » connaît son apogée. Mission accomplie avec un million de visiteurs fréquentant alors le domaine dans l’année.
Depuis, la « versaillo-mania » avec ses millions de visiteurs du monde entier, de donateurs, de pasticheurs, et autres personnes ou mouvements, a de beaux jours devant elle.
Pratique :
Versailles Revival
Du 19 novembre 2019 au 15 mars 2020
Château de Versailles
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