Art : Deux bonnes nouvelles et des couacs

L’amendement préparé par la Maison des Artistes sur le mécénat et achat d’œuvres par les petites entreprises a été discuté à l’Assemblée Nationale et au Sénat : il a reçu un très bon accueil.
Il est centré sur la défiscalisation pour les petites entreprises (car pour les particuliers, Bercy a dit niet !) afin d’aider le mécénat non spéculatif.

Miracle, la Monnaie de Paris fait machine arrière : elle arrête les expositions d’AC ( l’Art très contemporain, officiel et financier). Plutôt que de s’intéresser aux arts graphiques liés à la frappe monétaire, elle s’était égarée dans les godes chocolatés de McCarthy ou les fanfreluches de l’expo « Take me ». Mais voilà : elle perd du public, l’AC coute cher et « cannibalise » sic son énergie. Le début de la fin du squat du patrimoine par l’Art mondialisé, l’arrêt de la fabrique de positions dominantes avec de l’argent public ? A suivre…

Au chapitre, « y a un couac, dans la démocratie » : le feuilleton judiciaire du livre d’Aude de Kerros continue (1). La censure, à l’heure de la financiarisation, est sournoise et hypocrite. Le fond du livre n’est pas attaqué (mais non, pas du tout, la main sur le cœur nous sommes tous pour la liberté d’expression, si !) mais ça pinaille sur des détails dont le titre. Or l’accusateur veut éliminer « Géopolitique de l’Art contemporain » mot clef permettant un référencement efficace sur Internet. En droit français, personne n’est propriétaire des mots – ou alors les ayants droit d’André Breton aurait dû attaquer Françoise Hardy pour avoir repris le célèbre titre « L’amour fou » pour son roman (2). Menacer de procès un auteur et son éditeur peut suffire car une longue procédure crée une situation complexe à plusieurs intervenants (l’auteur contestataire, l’auteur contesté, son éditeur, leurs avocats réciproques), ce qui « cannibalise les énergies » comme on dit à la Monnaie de Paris. Bref, il est trop tôt pour en parler…

Mais, rassurez-vous, la censure de grand-papa, grossière, cassante, la censure d’Etat existe encore : elle a le mérite d’être claire et s’est exprimée devant la Commission des affaires culturelles de l’Assemblée Nationale, le 13 novembre, quand le général Jean-Louis Georgelin a déclaré à propos de Philippe Villeneuve (3) qui s’occupe de Notre-Dame de Paris : -« Quant à l’architecte en chef, je lui ai déjà expliqué qu’il ferme sa gueule et que nous avancions en sagesse (sic)….»

Le général est le missi dominici du Président Macron, la voix de son maître. La France doit manquer de sujets d’exaspérations pour qu’il jette ainsi de l’huile sur le feu. Moderniser Notre-Dame est qualifié en novlangue d’ «audace respectueuse » : autant dire « un viol respectueux » détruisant la double identité d’une cathédrale gothique et chef d’œuvre de l’architecture romantique. Comment des dirigeants qui ne respectent pas une vieille dame séculaire pourraient-il faire respecter les « meufs » des cités ? Me too de retour avec « Balance ton Général » ? Car enfin, la France a signé la Charte de VENISE et ce traité international impose la restauration des monuments historiques dans leur dernier état connu !

Christine Sourgins

(1) « Nouvelle géopolitique de l’Art contemporain », Eyrolles, 2019.

(2) Une excellente analyse d’un enfer amoureux dans un style dépouillé, presque « graphique » : F. Hardy, « L’amour fou », Albin Michel, 2012.

(3) Cet architecte en chef des Monuments historiques est, logiquement, partisan d’une restauration à l’identique.

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