Etait-ce utile de publier un dictionnaire des injures littéraires ? Bien sûr que non. Ce qui est la première bonne raison de l’avoir fait. Inutile, élitiste, injurieux, débordant de mauvaise foi, cet ouvrage a tout pour déplaire à son époque et c’est pourquoi il nous faut immédiatement remercier Pierre Chalmin de s’en être chargé.
Voici sans doute le plus grand condensé de mauvaise foi jamais commis. Règlements de compte, mesquineries, bassesses, jalousies : c’est le dictionnaire de l’ignominie humaine qu’il faudrait l’appeler. Quel intérêt y a-t-il à cela, s’interrogera-t-on ? Celui de se rappeler que l’être humain peut aussi être grand dans sa petitesse et qu’artistes et écrivains sont, loin des poncifs actuels, plus souvent veules que généreux ; que seule l’efficacité de la phrase, aiguisée comme une lame tranchante, peut faire considérer de grands génies comme tels lorsqu’ils s’abandonnent à leurs plus noirs penchants.
En se promenant dans ce miroir de l’âme humaine – que beaucoup de mes contemporains préfèreront ne pas voir, persuadés qu’en ignorant sa propre laideur on en arrive à être beau – on se dira que beaucoup et parmi les plus célèbres ont été oubliés. La subjectivité totale de cet ouvrage est encore une de ses qualités.
Malgré tout, certaines citations touchent de si près la vérité qu’on en reprocherait presque à leurs auteurs d’avoir oublié leur mauvaise foi. Ainsi de ces quelques phrases tirées du Journal impossible de Pierre-Emmanuel Prouvost d’Agostino :
« Chez les Delerm, c’est le néant de père en fils : père, fils et sans esprit. La « littérature » du père méritera de demeurer comme témoignage des ravages que peuvent occasionner, sur les esprits simples, le décervelage en règle de ce qu’on nomme encore l’Education Nationale et la lecture hebdomadaire de Télérama.
Delerm, père et fils : le père nous avait fait l’éloge vibrant du pet de mouche ; le fils l’exprime, et même, parvient à en imiter toute l’infinie subtilité, en en exhalant le souffle inspiré.
L’ennui avec Delerm (Philippe), c’est que, d’abord, il écrit avec les pieds… Mais qu’en plus, il a les pieds plats. »
Pierre Chalmin, Dictionnaire des injures littéraires, Ta gueule Bukowski, l’Editeur.
Poster un Commentaire