Madame Geoffrin, une femme d’affaires et d’esprit

/Un des grands personnages féminins du XVIIIe siècle, Marie-Thérèse Rodet, redeviendrait-il, comme en son temps, une notabilité à la mode ?
Cette dernière occupe le devant de notre scène littéraire et culturelle depuis la récente et vaste biographie composée par Maurice Hamon[1] précédant, de quelques mois seulement, l’ouverture de l’exposition que lui consacre la Maison de Chateaubriand : Madame Geoffrin, une femme d’affaires et d’esprit.

L’illustre Madame Geoffrin (1699-1777) puisqu’il s’agit d’elle, n’a jamais été complètement oubliée. Le souvenir de son salon, immortalisé en 1812 par Anicet Charles Gabriel Lemonnier (1743-1824) pour enrichir la collection de peintures de l’impératrice Joséphine au château de La Malmaison, se prolonge  bien au-delà du début du XIXe siècle pour parvenir jusqu’à nous.

Ainsi redécouvert, le personnage apparaît dans une vérité jusqu’alors voilée mêlant la femme de lettres réputée à la femme d’affaires avisée qui entend asseoir sa renommée par l’intermédiaire d’une fortune prospère adroitement gérée, puisqu’elle devient après le décès de son époux –et plus tard avec sa fille, la marquise de La Ferté-Imbault- l’actionnaire principal de la Manufacture royale des Glaces, à Saint-Gobin.

/L’exposition présentée jusqu’au 24 juillet 2011 à la Maison de Chateaubriand prend le parti de faire entrer le visiteur dans l’intimité de cette grande grande épistolière qui réunit chaque mercredi les gens de Lettres de la capitale et le lundi les artistes les plus en vogue. Deux dessins (conservés aujourd’hui au musée de Valence), réalisés par l’un de ses protégés, Hubert Robert, permet d’entrer dans cette intimité : assise au coin du feu dans son cabinet, Madame Geoffrin prend une tasse de café encore fumante tandis que l’un de ses domestiques relève une bougie à l’un des deux bras de lumière qui entourent le trumeau de sa cheminée ; ou encore une vue plus secrète de l’alcôve de sa chambre à coucher dont les rideaux sont retenus par un serviteur de la maison.

En plus de quatre cents pièces, l’existence au quotidien d’une femme d’influence du XVIIIe siècle semble resuscitée dans la demeure de campagne de Chateaubriand dont on se souvient des liens qui l’unissaient à la vaporeuse Juliette Récamier dont le salon a justementété  comparé par Sainte-Beuve avec celui de Madame Geoffrin.

Les questions littéraires liées à la publication de L’Esprit par Helvétius, de Bélisaire par Marmontel ou encore la présentation de la comédie des Philosophes de Palissot n’éclipsent pas l’évocation du voyage de Madame Geoffrin à Varsovie, en 1766, ni de son séjour viennois et bien d’autres thèmes évoqués tout au long du parcours de la visite.

L’exposition réunit en effet un exceptionnel cabinet des dessins où se trouvent réunis des projets décoratifs conçus pour le château royal de Varsovie par des artistes français sélectionnés par Madame Geoffrin. Elle présente également des tableaux de Vernet ou de Boucher provenant de ses propres collections et se termine avec l’exceptionnel service en porcelaine de Vienne que l’impératrice Marie-Thérèse offre à cette héroïne en 1770 à l’occasion du mariage du dauphin avec l’archiduchesse Marie-Antoinette auquel, à sa manière, elle aura contribué.

Jérôme Galiffer

Pratique :

Maison de Chateaubriand
87, rue Chateaubriand
92290 Châtenay-Malabry
01 55 52 13 00

Du 27 avril au 24 juillet 2011
Tous les jours sauf le lundi
de 10h à 12 h et de 14h à 18 h.

Visite guidée 5 euros ; visite libre 4 euros ; tarif réduit  2,5 euros.
Catalogue de l’exposition :  30 euros.

[1] Maurice Hamon, Madame Geoffrin, femme d’influence, femmes d’affaires au temps des Lumières, Fayard, 2010.

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