Les rumeurs fusaient. On le disait à bout de souffle, presque mort, incapable de tenir un concert. Ce samedi 16 juin au Stade de France, la Taulier a rétabli la vérité.
Certains vont à un concert de Johnny comme d’autres vont à Lourdes. Pleins d’espoir, déjà certains d’assister à un miracle. D’autres en revanche traînent un peu les pieds, pas vraiment convaincus que ce rockeur tout juste âgé de 69 ans soit encore capable de grand-chose.
Au moment de pénétrer l’immense arène du Stade de France, le doute perdure. Les gradins clairsemés, la fosse à moitié remplie, une chanteuse québécoise énergique mais une foule peu réceptive : aurait-on mieux fait de rester à la maison ?
Puis Louis Bertignac entre en scène. Il est 20h00, et à mesure que le jour décline l’ambiance se réchauffe. En un set court d’à peine trente minutes, l’ex guitariste de Téléphone parvient à dynamiser la foule. Une reprise de « Cendrillon » mêlée à « So Lonely » de Police ; un « Ca c’est vraiment toi » couplé à « Satisfaction » des Stones et un « « Autre monde » repris en chœur par le public…l’espoir naît.
La première partie achevée, démarre une période de latence. Un moment pendant lequel le public fantasme («je suis sûr qu’il va jouer celle-ci » « moi je parie plutôt sur celle-là » « Il va y avoir tel ou tel invité ») et tente de conjurer l’attente en manifestant son enthousiasme (les olas, cris en tout genre). Des instants aussi où d’autres visages connus apparaissent comme tout droit surgis du Bottin Mondain. Un chanteur amateur de poker ; une humouriste maladroite avec les additions de restaurant : un publicitaire très porté sur les Rolex ; un comédien devenu l’année dernière Intouchable ; le pape aux Ray Ban de la critique rock ; un rappeur adopté par la Polisse et même, surprise, un Ministre de l’Intérieur fraîchement nommé. Sans oublier bien sûr Laetitia la bien-nommée, blonde étincelante, saluant la foule pareille à une reine de concours de beauté.
21h35. Les regards se tournent vers la scène. Explosions, images d’une ville en flammes, vacarme tonitruant : Johnny descend d’une nacelle et plus de doute possible, le concert démarre.
Le son est lourd, le groupe emmené par le guitariste Yarol Poupaud (FFF, Black Minou) percute et ouvre un espace suffisant à la voix de Johnny, une voix très en forme, malgré les excès, les difficultés et l’âge.
Après ce « Allumer le feu », et deux ou trois morceaux électriques et rageurs, l’incursion de musiciens classiques de l’Orchestre de Paris insuffle une autre énergie au concert. Sous des spotlights rougeâtres, Johnny reprend « Diego (libre dans sa tête) » écrite par son ami Michel Berger. Une version simple, sans ambages, violons et voix, puissante et touchante.
Vers la moitié du concert, quand le stade est définitivement acquis à sa cause, Johnny ouvre la parenthèse « unplugged » du show. Guitares acoustiques, contrebasse, formation réduite : le petit groupe se déplace sur une plateforme jusqu’au cœur de la fosse. L’idole de jeunes et des plus anciens devient du coup proche, comme accessible. Il semble ravi, ému de fêter ses 69 ans dans ces conditions (« un chiffre érotique ») entonnant des reprises d’Elvis Presley et Eddie Cochran, deux de ses figures tutélaires.
Passé ces instants intimistes et légèrement nostalgiques, la dernière partie du spectacle sonne comme une conclusion efficace. « Que je t’aime » hurlé par la foule ; « L’envie », « La musique que j’aime » en duo avec son ami d’enfance Eddy Mitchell ou encore « Quand on a que l’amour » de Brel accompagné du pianiste Yvan Cassar. La partie est gagnée.
Minuit. Les lumières se rallument, les VIP achèvent leurs coupes de champagne, les fans se préparent déjà au concert du lendemain, et des réponses tombent. Rien n’est fruit du hasard. Et malgré des pointes un peu kitsch, clinquantes, Johnny reste un immense artiste avec qui l’on ne regrette pas sa première fois.
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