COP22 : tout reste possible

Par Christophe Mazurier*

/Alors que les États signataires de l’accord de la COP21 sont réunis à Marrakech, nous devons souhaiter plus que jamais que les décisions concrètes qui s’imposent soient prises.

Si l’essai de la COP21 n’est pas transformé par la COP22, il est à craindre que le match soit perdu. La plupart des États semblent vouloir tenir leurs engagements, en dépit de quelques réticences. Mais la mauvaise surprise pourrait venir des États-Unis. L’objectif de la première puissance mondiale est de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 26% d’ici à 2030. Lors de la COP21, l’État fédéral s’était aussi engagé à apporter une aide aux pays les plus pauvres. Le désormais président élu Donald Trump pourrait tout remettre en question. L’homme, en effet, affirmait une dépêche Reuters ce week-end, préparerait pour cette année une sortie de son pays de la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques. S’agit-il d’une vraie ambition politique ou plutôt d’un discours provocateur visant à faire parler de lui lors de la course à la présidentielle ? Nous allons le voir dans les semaines et les mois à venir mais une chose est sûre – l’avenir de la planète dépend des efforts des puissances mondiales, telles que la grande Amérique.

Donald Trump, en refusant de reconnaître l’impact négatif de l’activité humaine sur notre terre, semble oublier une chose qui peut paraître un truisme : quand le dérèglement climatique sera devenu si patent que les catastrophes naturelles se multiplieront, nous aurons beau relancer notre croissance économique, redonner du travail aux plus déshérités en remettant en marche les mines de charbon et les centrales au charbon, si c’est pour que la mortalité augmente et que le nombre de maladies induites par la pollution explose, ce sera un échec.

Dans La Croix, nous avons pu lire qu’ « un rapport de la Banque mondiale du 14 novembre montre que l’impact des catastrophes naturelles est sous-estimé, notamment sur les plus vulnérables ». Et le rapport de préciser que ce que nous avions gagné sur la pauvreté, nous sommes sur le point de le perdre, à cause des chocs climatiques extrêmes. Car, ce sont toujours les plus pauvres qui paient le plus lourd tribut. Et l’on peut se dire avec cynisme que si, comme l’affirme Jim Yong Kim – le président de la Banque mondiale – 26 millions de personnes tombent dans la pauvreté chaque année, ce sont des personnes qui vivent loin de nous et que cela ne nous concerne pas.
Il faut toutefois prendre en compte les 520 milliards de dollars de perte de consommation que cela induit. Et se dire que si le dérèglement climatique ne nous affecte pas aujourd’hui, il touchera nos enfants demain. Éviter cette pauvreté, donc la crise climatique, ce serait faire 100 milliards de dollars d’économie chaque année, affirme encore le président de la Banque mondiale. Ce qui est justement la somme que les pays riches s’étaient engagés à verser aux plus pauvres, en dédommagement de ce qu’ils subissent. Cela avait été signé à Paris. Il faut que les dispositions concrètes soient prises.

Déjà, l’Organisation météorologique mondiale nous annonce que 2016 est en passe d’être l’année la plus chaude de l’histoire. Et que les 16 premières années de ce siècle comptent parmi les 17 plus chaudes de l’histoire, la dix-septième étant l’année 1998. Nous sommes à une température moyenne supérieure à 1.2°C par rapport à la période préindustrielle. Et la concentration des principaux gaz à effet de serre dans l’atmosphère continue d’augmenter. Alors, nous pouvons bien sûr nous boucher le nez et fermer les yeux et refuser de voir que les catastrophes climatiques se multiplient. Nous pouvons nier les évidences, comme celle que l’augmentation de la température des océans a pour effet la disparition des deltas les plus importants du monde. Nous pouvons refuser de voir que le Colorado est le premier fleuve qui ne termine plus sa course dans une mer, asséché qu’il est par l’agriculture et l’élevage intensifs. Nous pouvons refuser de voir les guerres qui se préparent en Asie où la Chine est en train de détourner les plus importantes ressources d’eau douce d’une des parties les plus peuplées du monde. Mais nous pouvons aussi prendre les choses à bras le corps. Le temps n’est plus aux paroles mais aux actes. Si les plus importants pollueurs que sont la Chine, les États-Unis, la Russie et l’UE s’engagent véritablement à mettre en œuvre une politique de réduction des effets délétères de l’industrie sur la biosphère, nous nous en sortirons.
Cessons d’être cupides, soyons intelligents ! Marx nous a enseigné qu’il ne fallait pas dire que le temps, c’est de l’argent, mais que l’argent, c’est du temps. L’argent est du temps que nous avons consacré à la production d’un bien. Nous devons donc apprendre à employer notre temps à bon escient. Sans quoi, il nous en restera peu. L’argent en lui-même ne crée rien, alors que tout est possible à qui a le temps.

La COP22 va s’achever, mais rien n’est perdu, car nous avons encore le temps de mettre en place une véritable révolution énergétique et industrielle. Sachons mettre à profit cet aphorisme de sagesse : hâtons-nous lentement.

* Christophe Mazurier est un banquier et un homme d’affaires international. Il a collaboré au plus haut niveau au sein du Crédit Mutuel CIC pendant 25 ans et a notamment été directeur général puis président des activités de Private Banking à l’international. Philanthrope, Christophe Mazurier est également très impliqué en matière de protection environnementale et de mécénat culturel.

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