Tout d’abord, une bordée de vivats, un triple Hourra ! pour cette Petite Vermillon, ressuscitée, transfigurée par Alice Déon, digne fille de son père, et qui se distingue, désormais, par de superbes couvertures plus dans l’air de nos temps.
Et quand je songe au fonds de la Table Ronde, je salive à pleine bouche, je rêve pupilles écarquillées : à quand le pittoresque Hussard malgré lui (Willy de Spens), le sulfureux mais grandiose Guimbardes de Bordeaux (Stephen Hecquet), les chroniques à découvert de Jacques Laurent parues sous le titre évocateur de Au contraire ? Cette maison a de l’or entre les mains et nous, des envies soudaines de Klondike.
En attendant, après l’excellent Croquis de mémoire de Jean Cau (coup de Shako du prix des Hussards au passage), c’est désormais François Bott qui nous livre ses esquisses littéraires rassemblées dans Il nous est arrivé d’être jeunes.
En ces temps de confinement, en mal de nourritures pédestres, cette légèreté, ces traits de plume qui touchent juste sont un véritable bol d’air, une orgie d’oxygène pour nos pâles neurones. Les appétits les plus voraces lui préféreront sans doute des œuvres plus abouties comme la splendide série de Bruno de Cessole, Le défilé des francs-tireurs et L’internationale des réfractaires, ou le dernier ouvrage de Juan Asensio, Le temps des livres est passé, qui allient finesse de l’analyse et profondeur de pensées.
Bott, lui, est dans le coup de cœur, presque le coup de foudre : « C’est une des vocations de la littérature d’être une médecine pour les années sombres, et de revigorer les gens désemparés, les générations perdues… » (in André Breton) ou encore, « Car la littérature, c’est aussi l’art de se promener, de voyager, de déambuler, de flâner, de paresser… » (in Michel Déon) De circonstance, non ? A sa suite, vous apprécierez le bonheur de relire Bonjour tristesse ou découvrirez des auteurs moins connus comme Raymond Guérin ou Pierre Drachline.
Le tour de force est pourtant encore à venir, sous la forme d’un hommage très touchant, quasi-fraternel, à Roger Vailland (Saisons et passions de Roger Vailland) qui suit ses croquis. Seul Philippe Lacoche, avec son Roger Vailland, drôle de vie, drôle de jeu, est ici capable de rivaliser avec ce texte d’une rare beauté, véritable déclaration d’amour à ce cher disparu :
«Le mot d’ordre de cette génération, c’était de faire flamber la vie ».
Réchauffons-nous donc auprès de ce feu crépitant d’images et de rêves et, à notre tour, enfilons nos Bott de sept lieux pour partir sur des sentiers inconnus et merveilleux, dûment confinés.
François Bott : Il nous est arrivé d’être jeunes (Table Ronde, Petite Vermillon)
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