Le 20 novembre 2008, alors que venait tout juste de paraître le Royaume de Sobrarbe, son Journal de l’année 2005 et à cette occasion, Renaud Camus, était l’invité de Laurent Goumarre sur France Culture. Las, mais il faut être bien naïf pour s’en étonner, après quelques questions d’usage sur la parution du Journal, le réquisitoire s’est mis en branle, Laurent Goumarre endossant le rôle de partie civile et son acolyte celui de témoin à charge contre le pauvre Renaud Camus qui venait de se faire piéger une nouvelle fois.
Á charge contre lui : les deux gardiens de la libre pensée ont relevé dans les 600 pages du Journal plusieurs occurrences des mots « noir » et « arabe ». De là à prononcer le verdict, il n’y a qu’un pas qui ne mérite même pas d’être franchi : Renaud Camus est raciste, ce n’est plus à prouver, « l’affaire Camus » a déjà mis en exergue son antisémitisme. Raciste, antisémite, réactionnaire, misanthrope, il ne lui reste plus qu’à passer pour homophobe pour réunir à lui seul les cinq déviances capitales de la France moderne, mais justement, il n’est pas si simple de lui faire endosser ce rôle et c’est pour cela que certains continuent de s’acharner ; ceux qui ont renoncé n’en parlent plus. D’ailleurs plus personne ne parle de Renaud Camus, de l’écrivain Renaud Camus qui produit une des plus belles langues françaises demeurant comme un vestige d’une culture qui fut grande et s’apprête à sombrer dans le chaos.
Mais comment pourrait-on prétendre encore s’enorgueillir d’écrivains qui font vivre la langue, lorsque les principaux médias culturels la censurent ? Refuser à un écrivain le droit d’écrire les mots « noir », « arabe » ou « ethnie », c’est nier la réalité de ces hommes et de ces femmes dans leur différence et leur similitude fondamentales. C’est nier non seulement l’existence des mots mais aussi, c’est encore plus grave, la vérité qu’ils expriment. Cela tient de la logique la plus élémentaire à laquelle on se passerait aisément de revenir, mais dès lors que les écrivains, et leurs livres a fortiori, ne sont plus pour certains journalistes que des occasions de marteler dans nos crânes leur bonne pensée qu’ils nous intiment fortement de partager, nous y sommes forcés. Et en effet, quel odieux travail que celui de journaliste, dans ces conditions-là, comme le dit si justement Renaud Camus.
Quel odieux travail qui nous éloigne comme à dessein de l’intérêt véritable de l’œuvre : son écriture. Puisque le temps et l’espace nous ont été gâchés par des reproches insensés, nous ne pouvons plus que vous inciter à vous réfugier dans ce Royaume de Sobrarbe. Soyez-en persuadés, il est beau, on s’y trouve bien et, surtout, on y est libre !
Renaud Camus, Le royaume de Sobrarbe, Journal 2005, Fayard, 673 pages, 32 €
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