Défense et illustration de la langue française

« Je fus, en 2007, choqué par l’insistance grossière avec quoi les media (de gauche comme de droite), lors de l’élection de Nicolas Sarkozy et du décès du cardinal Jean-Marie Lustiger, mirent l’accent sur les origines hongroises de l’un, polonaises de l’autre ; sur le sang rastaquouère qui coulait dans leurs veines, » écrit Gabriel Matzneff.

La France – c’est-à-dire une majorité de politiciens, journalistes, intellectuels, défenseurs acharnés de la démocratie pour tous et de sa religion des droits de l’homme – à force de se gausser d’être la terre d’asile de tous les étrangers de la planète, de se gargariser de produire par centaines des lois pour chaque « minorité », de se congratuler de sa discrimination positive, ne fait que désigner à la vindicte populaire l’étranger à haïr et exacerber les manifestations identitaires et la formation d’enclaves ethniques sur son territoire. La discrimination positive, qui n’est que l’envers cynique de la discrimination, et la stupide fierté des français exhibant leurs étrangers comme des tableaux de chasse sont la bonne conscience d’un peuple qui ne comprend plus rien au sens de l’Histoire. La France a été édifiée, nous le savons, par un grand nombre de monarques, ministres, intellectuels et artistes venant de contrées étrangères, parfois même ennemies et par le rattachement à son territoire de peuples très divers. Mais cette unité n’a été rendue possible que parce que les nouveaux arrivants et ceux qui se mettaient au service du peuple français renonçaient d’abord à leur culture d’origine, s’engageant à se fondre dans le peuple de France en commençant par apprendre la langue française.
Mais nous savons bien qu’aujourd’hui tout le monde se fiche de l’histoire et de la langue française. Nous avons d’ailleurs une mémoire politique et historique si courte que le livre de Matzneff, qui n’est autre qu’un recueil d’écrits politiques et littéraires depuis ses débuts à Combat jusqu’aux récents articles mis en ligne sur son site personnel, est presque condamné d’avance, car s’attachant à revenir sur des époques lointaines et déjà tombées dans l’oubli.
La valeur essentielle de ce livre gît sans doute dans la langue magnifique de Matzneff, prouvant que le vrai enracinement dans une culture se fait par la langue (que l’on porte un nom hongrois, juif ou russe) et l’on ne peut éviter de songer que le grand mal qui touche la France vient certainement du pourrissement d’une langue qui a su par le passé faire aimer son peuple et sa terre à d’innombrables étrangers et qui ne sait plus inspirer le respect. N’y aurait-il pas un lien ténu entre le rejet et le mépris de leur langue par les Français eux-mêmes et l’impossible amour de « métèques » pour un peuple qui se renie ?

Gabriel Matzneff, Vous avez dit métèque, La Table Ronde, 407 pages 21,50 euros.

1 Comment

  1. Merci, cher Matthieu Falcone, du bel article que vous me consacrez ; merci également de rappeler aux internautes qu’un écrivain, c’est d’abord une écriture.
    Joyeuses Pâques !
    Gabriel Matzneff

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