Monumentaux chantiers de restauration, grandes expositions, parrainage d’artistes… Le monde de l’entreprise se trouve de plus en plus associé à celui de l’art, au profit duquel il investit des sommes parfois considérables.
Ces dernières années, on assiste à l’émergence de nouvelles formes de mécénat. La mutation du mécénat d’art repose aujourd’hui sur l’interaction entre deux univers distincts : celui des artistes et des œuvres, et celui des entreprises. Il s’agit de s’appuyer sur les points communs entre les mécanismes du marché de l’art et les ressorts propres à la création et au développement des entreprises. A l’aune de cette constatation, trois questions se posent. Aujourd’hui, l’entreprise est-elle au service de l’art ? Ou bien l’art se retrouve-t-il au service de l’entreprise ? Enfin, un juste enrichissement mutuel est-il possible ?
ART ET ENTREPRISES : UN COUPLE MIXTE
Le mécénat à destination de l’art est une tradition ancienne. Depuis l’empereur Auguste, le Mécène, riche et célèbre, prince ou grand bourgeois, prit sous son aile la création et les artistes. Depuis lors, les dons de personnes privées sont devenus de plus en plus rares, et l’art puise ses sources de financement auprès de grands groupes comme AXA ou la Société Générale, et de fondations comme la Fondation Taylor. Le phénomène le plus répandu aujourd’hui est le mécénat d’entreprise. Dans les années soixante-dix, Renault fut la première grande société à s’intéresser au monde de l’art et à investir dans le rachat d’œuvres plastiques. Maintenant, sociétés privées ou publiques, banques…, forment avec la matière artistique un couple improbable mais quasiment indissociable. Les sommes en jeu se révèlent considérables, et nombre d’expositions ne pourraient voir le jour sans ce type d’aides.
La croissance exponentielle ces dernières années du mécénat d’entreprise soulève un certain nombre de questions. Ainsi, paradoxalement, l’organisme qui permet la réalisation de grandes expositions ou le rachat d’œuvres d’art reste souvent dans l’ombre, comme s’il était honteux d’en faire état. Mieux, certaines sociétés ne communiquent même pas l’information à leurs collaborateurs. Alors, quelles règles régissent le mécénat d’entreprise (voir entretien Patrice Marie) ? Est-il réellement valorisant en terme d’image ? Ou bien les entreprises trouvent-elles un autre intérêt à parrainer des manifestations artistiques – et lequel ? En tout état de cause, le logos imprimés sur les affiches aujourd’hui ne suffit plus, et d’autres formes d’interactivités voient le jour.
Finalement, l’entreprise se met-elle au service de l’art ? Ou bien est-ce l’art qui se retrouve au service de l’entreprise ? Au risque de se voir instrumentalisé, en position de valet d’intérêts purement économiques ?