1971. Au soleil brûlant de la Côte-d’Azur, les Rolling Stones préparent leur nouvel opus. Exilés fiscaux, ils laissent derrière eux la froideur de leur terre natale, l’Angleterre, afin de se concentrer pleinement sur la musique.
De ces longs mois d’enregistrement dans la villa Nellcôte louée par Keith Richards, sortira l’année suivante un album crucial. Un moment déterminant dans leur carrière, et sans doute dans l’histoire du Rock.
Exile on Main Street, vaste assemblage de dix huit morceaux, transpire la moiteur et la sensualité, l’alcool et les brumes nocturnes. Véritable voyage, retour aux sources, l’album revendique haut et fort sa parenté directe avec la musique noire.
Blues, Gospel, R n’ B, Rock and Roll : autant d’influences fondamentales. Du « riff » inaugural de Rocks Off au tonitruant Soul Survivor final, les Stones crachent un venin aphrodisiaque, distillé avec science et désinvolture.
Parsemé de mélancolie (Let it Loose), de rage (Rip this Joint), d’hymnes fédérateurs (Happy, Tumbling Dice), l’épopée sensorielle se solde par une impression de cohérence, malgré la diversité des registres abordés. Sous les mains du groupe, les cloisons entre les répertoires éclatent, sorte d‘attentat sonore salutaire, d‘où jaillit l’évidence de l’unité de la Musique .
Quarante après, objet d’abord de critiques ( format disproportionné, mixage raté…) puis de reconnaissance indiscutable (perçu par certains comme le « meilleur album Rock de tous les temps ») Exile continue son chemin. Réédité aujourd’hui, augmenté d’une dizaine de titres supplémentaires, et d’un documentaire (Stones in Exile), l’œuvre revient sur le devant de la scène, parée de mille feux.
Ces morceaux rares, parfois inédits, constituent inévitablement le principal intérêt d’un tel achat (sauf si bien sûr quelques uns d’entre vous ne possèdent pas encore cet album incontournable!). Oscillant entre ballades (Following the River, So Divine), rythmes endiablés (Good Time Women, Title 5) et versions alternatives de pièces présentes sur l’album définitif (Soul Survivor chanté par Keith Richards, Loving Cup), le matériau ainsi dévoilé saura satisfaire la plupart des auditeurs.
Un bémol pourtant. L’obsession du rajeunissement gangrène à coup sûr l’authenticité proclamée de ce type d’enregistrements. Les overdubs (technique de réenregistrement de pistes sonores) trop présents sur certains morceaux, pourront en effet désappointer l’oreille habituée aux Stones.
Toutefois, ces détails ne pèsent pas bien lourds. Ces trésors enfouis, reflets de leur superbe d’antan, ravive la magie de toute une époque. D’un moment, où sous le ciel azuré de Saint Jean Cap Ferrat, une poignée de jeunes britanniques, loin de leur patrie, dessinait les contours d’un nouveau paysage musical.
Guillaume Blacherois
Sortie nationale le 17 mai 2010.
Exile On Main Street, 2 CD, Universal, à partir de 17, 99 euros.
Exile On Main Street Edition Deluxe, Universal, 2 CD, 2 LP, 1 DVD, 1 Livre, à partir de 109,99 euros.
Diffusion du documentaire Stones In Exile, sur France 5, le 10 juin au soir.
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