Il y a quelques mois, je me suis rendu à Bruxelles à la réunion du Bureau international de l’AREV, autrement dit « Association des Régions Européennes Viticoles ». Pas moins de 75 régions en sont membres. Elle est présidée par Jean-Paul Bachy, également président du Conseil régional de Champagne-Ardenne.
Chaque région dispose d’une double représentation : politique et professionnelle, un binôme très efficace. Si efficace que la décision de la Commission Européenne d’autoriser la production de vins rosés par coloration d’un vin blanc avec du vin rouge a été « retoquée » à la suite de l’intervention de l’AREV.
L’AREV se considère comme un « véritable parlement de la viticulture européenne » et intervient auprès des institutions européennes ou mondiales chaque fois que le vin est concerné (marché, taxes, appellations, biologie et génétique, vin et santé, etc).
Le problème des droits de plantation
Dans la plupart des pays producteurs européens, la création de nouveaux vignobles (ou leur extension) est subordonnée à l’obtention de droit de plantation. Sans entrer dans trop de détails, disons qu’ils sont presque inexistants (quota annuel fractionné par l’état) et que la nouvelle OMC-vin (instance européenne) a décidé- Conseil des ministre de décembre 2007 – de les abolir dès 2016, voire 2018 dans certains cas. Ajoutons qu’en France les droits de plantation doivent être compléter par une autorisation de plantation (sauf pour les ex-vins de table).
Ajoutons encore, pour éviter toutes confusions, que la suppression des droits de plantation n’affecte aucunement les nombreuses règlementations qui s’appliquent aux AOC et autres IGP.
Position de l’AREV
L’AREV prend en compte « les intérêts de la filière viti-vinicoles », ce qui l’a conduit à s’opposer à la suppression des droits de plantation. Pour assoir sa position elle a commandé au professeur Montaigne du Centre International des Hautes Etudes Agronomiques Méditerranéennes un étude « scientifique » des impacts de cette libéralisation, étude présentée début mars à Bruxelles.
Nous allons résumer 6 questions traitées dans cette étude.
1/ Si la taille d’un domaine s’accroit, les performances économiques augmentent-telles ?
Réponse : Pas sensiblement, sauf dans ceux de grande renommée.
2/ Le prix des droits de plantations alourdit-il le coût de la création d’un vignoble ?
Réponse : Non. (prix de vente et volumes faibles, pas de création de grands vignobles)
3/ Les droits de plantation ont-ils contribué à l’équilibre du marché ?
Réponse : Non, pas plus que leur absence dans les pays sans règlementation.
4/ Existe-t-il d’autres mécanismes de régulation du marché ?
Réponse : En Argentine un système tend à stabiliser le prix des vins. Est-il fiable ?
5/ Qu’en est-il de l’emploi ?
Réponse : les vignobles prestigieux emploie plus d’un salarié par 4,8 ha (moyenne française)
6/ Et les paysages ?
Réponse : la suppression des droits de plantation aura trois conséquences : la plantation en
plaine, l’abaissement de la qualité, la production de vins bon marché.
Cette étude exploite une méthode logique : comparer des pays dépourvus de réglementation à d’autres limités dans leurs droits. Mais comparer de « vieux pays » et des pays neufs est une mission impossible, sans signification. L’exemple de l’Australie est parlant : jusqu’aux années 90, c’est un modèle international de succès, le libéralisme triomphe. Depuis, surproduction, crise internationale.
Conclusion : le libéralisme n’empêche pas les crises. Le cas de l’Argentine aurait mérité une étude plus approfondie (la régulation après la production) et on ne connait pas la validité de la méthode en période difficile, ni sa longévité; Autre exemple, celui de lAlentejo, région portugaise aux droits réglementés dont le vignoble a pu doubler sa superficie en 10 ans. Comment ? Par transfères de droits d’une région pauvre (Le Ribatejo). C’est une contre-preuve. Les droits ne « stabilisent » pas un vignoble et l’absence de droits « récupérés » n’aurait pas permis à L,Alentejo de se développer !
L’AREV a rassemblé 15 pays contestataires (anti-abolisionnistes) totalisant 215 voix, il manque donc 40 voix pour atteindre la majorité qualifiée (255) et contraindre la Commission européenne à maintenir les droits de plantation.
Michel Dovaz
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