Certains, l’air docte, le sourcil froncé, conseillent d’attendre d’avoir franchi noblement le cap fatidique de la cinquantaine pour se lancer dans l’écriture d’un roman. Mais est-ce bien raisonnable de patienter encore une bonne vingtaine de printemps pour noircir quelques pages d’éternité ?
Un précédent fameux, cependant, Bernard du Boucheron, dont le premier livre (Court serpent, Gallimard) fût couronné par le Grand prix du roman de l’Académie française, alors que son auteur affichait soixante-seize ans au compteur. La valeur attend parfois le nombre des années. Le parallèle avec Jacques Héripret n’ira sans doute pas jusque-là, même si son dernier ouvrage, qui est donc le tout premier à quatre-vingt-deux ans bien sonnés, rappelle, par moments, un autre joli livre de Bernard du Boucheron, La guerre en vacances (paru aux éditions du Rocher, en 2016).
Les deux écrivains n’ont certes pas connu un itinéraire identique, Jacques Héripret devenant un reporter connu et reconnu, après avoir tâté du « paparazzitisme », tandis que Bernard du Boucheron faisait carrière dans l’industrie à haute valeur ajoutée. Un photographe, me direz-vous ? Faut-il alors craindre de ne pas résister à l’épreuve ou de succomber sous les clichés ?
Par déformation professionnelle, Jacques Héripret en glisse quelques-uns, de ci-de là, sans qu’ils n’altèrent cependant le déroulé d’une belle aventure, comme je les aime, à pieds-joints sur notre histoire, des drames de la seconde guerre mondiale à ceux de la guerre d’Algérie, pour finir, appareil en pogne, au milieu des swinging sixties à la sauce cocorico, à la table de Charlie Chaplin, chez « la Grosse » (surnom « affectueux » donné à Régine).
Cette belle promenade dans une jeunesse trépidante, où l’audace subviendra à une naissance plus favorisée, rappellera, ce n’est pas sa moindre qualité, que nous vivons, malgré tout, une époque formidable ».
François Jonquère
« Les osselets » de Jacques Héripret – L’Editeur
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