Les poltergeists sont connus du grand public. Littérature et cinéma ont mis en vedette ces bruits et coups insolites sur les murs, portes ou vitres, déplacements inopinés, bris inqualifiables d’objets ou autres faits « psychokinétiques » (action humaine mystérieuse sur la matière). Alors, illusion, hallucination ou confusion ?
Trois explications concernant les poltergeists prévalent :
– l’hypothèse diabolique : un poltergeist serait une manifestation du « diable », un fruit empoisonné des enfers, un rejeton du surnaturel d’en-bas », répandant peur et terreur parmi les bonnes âmes ;
– l’hypothèse spirite : il s’agirait de bruits provoqués par un ou des défunts mécontents ou malveillants : parents, amis ou ennemis proches en général ; dans cette perspective, les poltergeists seraient le fait de « revenants » ;
– l’hypothèse parapsychologique : « l’esprit » (ou l’inconscient) agirait à distance sur la matière inerte ; un sujet « psi » pourrait déplacer meubles et objets lourds dont le changement de place nécessite force musculaire et attention en temps normal.
Bref, bruits ou mouvements d’objets constituent les deux catégories de poltergeists. Mais comment un fauteuil ou un autre meuble peut-il être soulevé dans les airs sans une aide humaine ? Pourquoi des coups (violents et répétés) sont-ils frappés dans les murs d’une maison ?
J’ai interrogé le Docteur Philippe Wallon, psychiatre, auteur de nombreux ouvrages sur ces « dossiers ». Selon lui, les poltergeists seraient constitués de « bruits » intempestifs produits par « l’esprit humain ». C’est un « effet psychokinétique sur un mode sauvage », explique-t-il. De plus, rares sont les « correspondances » entre un bruit et une vision : dans l’ordre du phénomène, ceux qui entendent des « esprits frappeurs » ne voient rien.
Lorsque la « maison crie », la psychothérapie est proche, précise le Docteur Wallon, car les poltergeists sont l’expression d’un malaise intérieur. Ils traduisent des conflits psychiques. Le sujet exprime ses désirs refoulés sur un mode inaccoutumé. Pour l’essentiel, ces faits concernent des jeunes en situation difficile, sur le plan scolaire et/ou dans le domaine familial. Loin d’être le privilège d’adultes bien dans leur peau, les poltergeists conduiraient sur le divan du thérapeute ! Dans le mot « poltergeist », il y a « geist » : « esprit » en allemand.
Philippe Wallon cite des exemples connus, dignes de foi, comme celui d’Anne-Marie Schneider, employée chez un notaire en 1967. Selon les témoins, cette jeune secrétaire faisait tourner les tableaux, déborder les niveaux des bacs d’encre des photocopieuses, éclater les ampoules électriques, ouvrir et fermer les tiroirs, éteindre les néons du plafond, donner des centaines de coups de fil en quelques heures… Un jour, on s’est aperçu du fait suivant : ces phénomènes cessaient lorsqu’Anne-Marie s’absentait. Aucun doute : la secrétaire était cause de ces dérèglements. Le professeur allemand Hans Bender a étudié ce cas avec précision et méthode dans son livre La Parapsychologie devant la science.
D’autres récits évoquent l’aspect concret des poltergeists, comme l’histoire de l’église de Delain (1998). Il ne s’agit donc pas d’hallucinations auditives ou visuelles car, en ce cas, il faudrait parler d’hallucinations « collectives ». Mais ce concept ne repose sur aucun postulat scientifique.
Pouvons-nous alors classés les poltergeists parmi les phénomènes occultes ? Sur quelles bases opérer un tel choix ? À coup sûr, il conviendrait de mener une enquête rigoureuse au-delà des peurs et des fantasmes, au-delà même de la matérialité du phénomène qui hante les incertitudes de nos cerveaux et les incertitudes de notre imaginaire.
S’informer :
Philippe Wallon, Expliquer le paranormal, Paris, Albin Michel, 1996
Le Paranormal, Paris, Gallimard, 2002, collection Que sais-je ?
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