Par Jean Vitaux*
La galette des rois est le gâteau traditionnel servi le jour de l’Epiphanie après la trêve des confiseurs. L’origine des rois est biblique, faisant directement allusion aux trois rois mages, venus apporter à l’enfant Jésus l’or, l’encens et la myrrhe, mais les écritures ne mentionnent pas de gâteau.
Le gâteau des rois n’apparut en effet qu’au XIV° siècle chez des moines de Besançon. Ils tiraient au sort leur maître de chapitre en mettant une pièce d’or dans un gâteau. Cette pratique était sans doute un peu dispendieuse ; la tradition du gâteau des rois se répandit, mais la pièce d’or fut remplacée par une fève.
À partir du XIX° siècle, les fèves furent progressivement remplacées par des sujets en porcelaine d’inspiration religieuse ou profane. Les fèves rappelaient une résurgence ancienne : en effet, pendant la fête des Saturnales Romaines, fête d’inversion de la fin d’année civile, Tacite raconte qu’ « il était d’usage de tirer au sort la royauté ». Un garçon se mettait sous la table et distribuait les parts au hasard : on nommait ce garçon innocent Apollon ou Phoebée. La royauté ne durait qu’un jour ; le roi désigné était un esclave, doué de tous les pouvoirs pendant un jour, que ‘on mettait ensuite à mort dans les temps anciens. Il est très surprenant et amusant de constater qu’on demande toujours à un jeune garçon caché sous la table de tirer les rois.
Á la cour du roi Louis XIII, on demandait à une grande dame de devenir reine d’un jour.
Les chanoines de Saint-Germain s’opposèrent à cette coutume immémoriale, d’origine païenne, et surtout cause de débordements (ivresse et paillardise) difficilement contrôlables. Sous la révolution, la fève devint un gâteau phrygien. Pendant le siège de 1870, en raison du manque de tout, on la remplaça par un haricot. La tradition est restée dans la France républicaine, puisque depuis 1975, sous la présidence de Valery Giscard d’Estaing, les boulangers apportent une galette des rois géante au Palais de l’Elysée. Á la fin du XIX° siècle, les boulangers offraient à leurs bons clients une galette de pain pour fêter la nouvelle année. Ce qui entraîna l’ire des pâtissiers et des conflits sans fin.
La galette des rois est très variable selon les régions : originellement c’était une galette de pain. Dans le midi, c’est une brioche parfumée à la fleur d’oranger et souvent parsemée de fruits confits que l’on appelle traditionnellement « le Royaume ».
Dans la région parisienne, c’est devenu une galette de pâte feuilletée, le plus souvent garnie de frangipane, un peu à la manière d’un Pithiviers. La frangipane est faite de sucre, de farine, de lait parfumé à la canelle et d’oeufs aux quels on ajoute des marrons écrasés et des amandes (dont une amère).L’origine de la frangipane reste mystérieuse : son nom vient d’un parfumeur installé à Paris, au début du XVII° siècle, dont la spécialité était de parfumer les gants !
*Jean Vitaux est docteur en médecine et gastro-entérologue mais aussi fin gastronome.
Membre de plusieurs clubs renommés dont le fameux « Club de 100″, c’est un grand connaisseur de l’histoire de la gastronomie. Il est notamment, avec Benoît France, l’auteur du célèbre Dictionnaire du gastronome (éditions PUF), mais aussi du Que-sais-je sur la Gastronomie et de La Mondialisation à table (PUF).
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