« Tour Sans Faim »et haut-le-cœur

* Par Christine Sourgins

/À la Cité de l’architecture à Paris, tout au bout de la galerie des moulages, dans la salle Viollet-le-Duc, du 1er au 4 juillet devait trôner un gâteau de 10 mètres de haut sur 1,5 m de diamètre. Une idée de l’architecte Jean Bocabeille et du cuisiner Gilles Stassart, chef du restaurant perché sur le toit du Palais de Tokyo.
Cette construction gastronomique, baptisée « Tour Sans Faim », se voulait un hommage déjà discutable au projet abandonné de Jean Nouvel « La Tour sans fin » : « sans faim » car avec ses 800 pâtisseries, 600 kilos de farine, 272 œufs et autres ingrédients étaient incomestibles selon les normes européennes…
SDF et quart monde s’abstenir. Bobos bien venus par contre.

Le projet a mobilisé pâtissiers, architectes, ingénieurs, spécialistes de la perspective et graphistes, dans le cadre de «Imaginez maintenant», manifestation organisée dans neuf villes de France par le Conseil pour la création artistique présidé par Marin Karmitz. Il s’agit d’offrir un espace d’expression à de jeunes artistes de moins de trente ans dans des lieux de patrimoine.

Cette pâtisserie devenue une architecture a suscité la colère d’un ensemble d’architectes, qui ont mis en ligne une pétition, et qui se souviennent qu’il y a en France un léger problème de logement, sans compter les soucis climatiques et énergétiques. L’été est la période où les SDF et les ventres creux meurent le plus…

Le Tour de force a viré au fiasco. Le 2 juillet par 30 degrés le plus haut gâteau du monde a dû être démonté d’urgence : la « Tour sans faim » prenait des allures de Tour de Pise et menaçait d’écroulement.

Les organisateurs restent satisfais : ils figureront « au panthéon des cultures populaires » sic, le Guinness Book of Records. Un huissier du célèbre guide ayant enregistré à temps la performance prochainement homologuée.

L’honneur de l’art officiel est sauf !

* Historienne de l’art, Christine Sourgins connaît bien les musées pour y avoir travaillé, les artistes et le grand public par son engagement dans les
structures associatives.
Son parcours lui a procuré un poste d’observation de la vie artistique en France, ainsi qu’une indépendance de pensée et d’expression.
Elle a publié de nombreux articles et un ouvrage de référence :

« Les mirages de l’Art contemporain» , La Table Ronde, (2005), actuellement 4ème édition.

Anime un blog : http://sourgins.over-blog.com/

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