La révolution qu’il faut faire (3/3)

/><b><span/Troisième volet et fin de notre dossier consacré à la Révolution.

La vraie révolution qu’il reste à faire

Si ce ne sont certes pas Olivier Besancenot, Daniel Cohn-Bendit, François Bayrou et consorts, ceux qui nous promettent éternellement la révolution mais n’ont tout au mieux que quelques réformes à proposer qui sont les authentiques révolutionnaires, qui sont-ils ?

« Il ne faut se faire en effet aucune illusion : tant qu’une voie est potentielle pour modifier la société par l’atténuation des conflits et la solution des tensions, les groupes intéressés trouveront finalement cette voie au travers peut-être de beaucoup de tâtonnements et même éventuellement de révoltes, mais la gestion des conflits reste possible sans révolution et celle-ci n’aura pas lieu : l’homme ne cherche pas plus la révolution vraie que la guerre.  »
Nous comprenons bien que ceux qui nous proposent des changements à l’intérieur même de la société telle qu’elle existe sont au mieux des réformateurs, au pire des démagogues.

Si nous voulons vraiment bouleverser l’ordre établi, c’est la société industrielle et technicienne dans son ensemble qu’il faut remettre en cause. C’est pour cette raison qu’aucun parti politique, à quelque extrême qu’il soit, n’effrayera jamais ni les dirigeants, ni les concitoyens.
À l’inverse, nous remarquons à quel point certains marginaux qui refusent de fonctionner selon les principes de la société technicienne et de consommation, déroutent totalement l’Etat. Ainsi Julien Coupat et sa bande, à qui aucun fait établi n’est reproché, se retrouvent en prison parce que l’Etat ne sait pas comment gérer ces électrons libres. Parce que le système dans lequel nous sommes ne peut pas supporter que certains troubles fête refusent d’adopter ses règles.

Aux Etats-Unis, un homme a fait trembler l’Etat de 1978 à 1996, date de son arrestation par le FBI après la plus longue chasse à l’homme de son histoire. Cet homme, Theodore J. Kaczynski, alias unabomber, a fait vaciller l’Amérique en partie par les colis piégés qu’il envoyait et qui ont fait quelques morts mais surtout parce que dans ses écrits il remettait radicalement en cause le système technologique tel qu’il existe.
À l’automne dernier, les éditions Xenia ont publié pour la première fois la totalité de ses manifestes de manière simultanée en anglais et en français avec l’accord de l’auteur, mais presque personne n’en a parlé. Pourtant, s’il est impossible de justifier ses actions terroristes, les textes de Kaczynski méritent d’être lus.

Dans l’effondrement du système technologique, il accuse ce système d’être à l’origine des maux de l’homme moderne, parce qu’il l’empêche de réaliser son « processus de pouvoir », l’homme étant constamment supplanté par les machines et un Etat tout puissant. Il accuse également la technologie d’être à l’origine du désastre environnemental de la planète, des frustrations, dépressions, suicides et violences humaines, plaidant pour un retour à une vie primitive.
Cette pensée radicale peut effrayer, bien sûr mais pousse aussi à réfléchir sur notre mode de vie qui n’est pas la seule voie possible pour l’homme.

« La révolution sera le fait de l’Occident ou ne sera rien du tout »

Parce que l’Occident a imposé son modèle industriel, technologique et étatique dans le monde entier. Parce qu’il a été le premier à développer une société dans laquelle tout est non seulement consommable mais doit être consommé (images, informations, culture, nourriture, loisirs, etc.), parce qu’il a mis en place « un système médiatisé où tout est devenu abstrait, il n’y a plus d’hommes responsables de quelque chose, il n’y a même plus un organisme que l’on puisse rendre coupable, » c’est à lui que revient la lourde tâche de démanteler ce système.

« Notre société est fondamentalement technicienne et étatique. Tous les caractères de notre société aboutissent là, alors il faut dire que s’il y a une révolution nécessaire à effectuer, elle ne peut être qu’une révolution sur le fait de la technicisation et l’étatisation. » Et il faut bien comprendre que si la première chose à changer est cette course effrénée à la technologie qui aliène l’homme car chaque technologie nouvelle apporte sont lot de contraintes, il s’agit d’un bouleversement profond de la société.

En ce sens Ellul a raison de nous mettre en garde, la révolution, si elle est souhaitable, ne se fera pas sans heurts, ni sacrifices car elle doit commencer en chacun de nous. Elle implique que chacun freine son niveau de consommation et de dépendance aux nouvelles techniques. Elle implique de refuser la soumission à cette société du spectacle, du tout consommable, du tout administré et pris en main par les instances étatiques. Plus qu’un sacrifice, elle demande une véritable ascèse.

« Le second phénomène en fonction duquel la révolution doit être voulue et pensée, c’est la croissance de la technique et la transformation de la société en société technicienne et technicisée (…) Cela implique une société de consommation, d’abondance et d’organisation. (…) Une vraie révolution doit en effet aujourd’hui se faire contre la croissance et l’amélioration de l’organisation. »

Depuis la fin des années soixante, époque à laquelle ce livre a été écrit, le phénomène contre lequel il est nécessaire de se battre n’a pas beaucoup changé, il s’est simplement renforcé, c’est pourquoi, plus que jamais une vraie révolution reste à faire pour sortir de l’aliénation dans laquelle nous maintient la bureaucratie étatique et la société technologique de consommation effrénée. Sommes-nous prêts ?

Bibliographie :

Jacques Ellul, Autopsie de la révolution, éditions de la Table Ronde, la petite vermillon, 2008
Theodore J. Kaczynski, L’effondrement du système technologique, éditions Xenia, 2008
Guy Debord, La société du spectacle, éditions Gallimard Folio 1996

2 Comments

  1. Bonjour,
    Ha quel délice de lire ces mots sur la révolution à faire!!
    Me permettez-vous de publier quelques passages sur « facebook » dans le cadre de « l’art ouvrier »?
    merci d’avance.
    tina

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