Transboréal lance la collection : « Petite philosophie du voyage »

/><b><span/La vocation de la maison d’édition Transboréal est la même depuis dix ans : « Promouvoir le travail d’auteurs, d’illustrateurs et de photographes ayant fait preuve d’abnégation et de courage lors d’études ou de voyages au long cours marqués par une réelle connivence avec le milieu humain ou le milieu naturel ». Belle apologie de l’aventure, humaine avant tout.
Il y a quelques mois Émeric Fisset, son fondateur, lançait une collection, : « Petite Philosophie du voyage », affichant douze titres. Le principe : 89 pages dans un petit format (11 x 16, 6 cm), à 8 €.
CultureMag en a lu trois. Trois éloges qui vous seront utiles pour partir en voyage.

D’abord, L’Ivresse de la marche, petit manifeste en faveur du voyage à pied, signé Émeric Fisset, est écrit comme un véritable manifeste. Il part de ce postulat de départ : « Ce qui fait le charme du voyage est d’échapper à la routine ; le charme du voyage à pied, de s’ouvrir sur l’inconnu ».
Mais attention, pour cet homme de grands et de petits chemins, pas de montre, pas de dépôt logistique ni de liaison satellite, encore moins d’adresse de contact. Seul outil de reconnaissance autorisé : les cartes. « C’est l’imprévu qui fait l’excitation du voyage à pied », écrit-il, en détaillant ici et là quelques-uns de ses parcours, comme si la fatigue et l’inconnu lui donnaient un surcroît de volonté. On reste effaré par tant de courage et d’abnégation car on l’imagine vraiment dans sa traversée de l’Alaska, à marcher six semaines « comme un ours dans la toundra et comme un orignal dans la taïga ».
Leçon d’endurance et de courage quand on connaît la faim « qui rend les jambes molles et le cerveau aboulique ». Des moments de survie qu’il n’hésite pas à qualifier de « bestiales ».
Épreuve solitaire exemplaire, mais qui montre combien ce ne sont pas les pieds seuls qui vous font marcher, mais une certaine tension psychique, un dépassement de soi qui vous conduit aux sommets…
Dans un style épatant, Fisset nous convie à ses chemins de traverse, à ses joies quotidiennes, à ses moments d’émotions, à ses visions, autant de sensations vécues qui ont fait de cet homme serein, « l’artisan de son propre bonheur ». On aimerait un jour suivre son conseil : partir sans billet de retour pour éprouver soi-même son propre détachement.

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Baptiste Roux a signé La Poésie du rail, Petite apologie du voyage en train, manifeste ferroviaire rédigé par un spécialiste de Patrick Modiano, dont on retrouve en exergue ce billet : « Si l’on habite près d’une gare, cela change complètement la vie. On a l »impression d’être de passage. Rien n’est jamais définitif. Un jour ou l’autre, o monte dans le train » (La Petitte Bijou). Alors Baptiste Roux est monté dans le train, dans des centaines de trains depuis sa tendre enfance, lui qui est né en 1969. Heureux temps des michelines un peu poussives ! « Ces trains appartiennent, comme le Laguilole ou la photo de calendrier des Postes, au patrimoine français, et dessinent dans la mémoire collective des images d’une province agreste et fleurie… », se souvient cet auteur nostalgique.

Mais où sont les voyages d’antan ? Il en restitue le parfum, les ambiances feutrées dans les compartiments décorés par des photos en noir et blanc, les trains couchettes, ou encore les moments perdus dans les buffets de gare, et plus angoissante, « l’attente fiévreuse de l’être aimé sur le quai de la gare (…), le cœur se gonfle, et jamais train n’a paru plus beau ».

Cette mélancolie des voyages en train est d’autant plus oppressante qu’aujourd’hui nous vivons une ère de vitesse et de froideur exemplaire. Le TGV est certes un train révolutionnaire mais sans charme. On se demande qui a pu concevoir un train au décor aussi laid, qui a pu choisir des couleurs aussi criardes, d’un mauvais goût à l’image de cet européisme ambiant qui voudrait tout banaliser, sans aucune originalité, balayant justement le goût du « patrimoine français » dont parle avec respect Baptiste Roux. « Ce voyage, cette plongée dans un univers clinique et aseptisé, ferait passer une cure de relaxation New Age pour un stage commando en Guyane », souligne l’auteur avec une certaine causticité. Bien vu, bien senti.

Passionné de cinéma et de littérature, le livre de Baptiste Roux est truffé de références à Kafka ou à Hitchcock tout en distribuant quelque clin d’œil aux trains mythiques comme le Transsibérien ou l’Orient-Express. Vers la fin, il traduit ce que tout voyageur pense secrètement quand il écrit que si nous n’anticipons pas un retard d’un quart d’heure lors de chaque voyage en train,  on est alors « un Martien – ou un provincial » !
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/><b><span/Il n’y a pas de voyage sans urbanité, comme diraient les Romains. Bertrand Buffon s’applique à nous donner ce goût de la civilité dans Le Goût de la politesse, petit précis des bonnes manières à l’usage du vaste monde.
Amusant, cinglant, révélateur, informatif, ce petit livre va devenir un vade-mecum essentiel pour le voyageur exigeant. Car il rappelle que la politesse est un lien social, une façon de réunir les hommes entre eux.

L’enjeu en est cette politesse universelle, « non pas la règle valable en tel endroit et dans telle circonstance, mais l’intelligence des règles, qui suppose la connaissance des principes qui les gouvernent ». Car la politesse, née au Moyen-âge, qui devient vite l’art des bonnes manières, reste un vieux fond chevaleresque et un code de bonne conduite que certains incultes se damneraient pour apprendre ou plutôt pour apprivoiser.

Sous une plume élégante, cet homme de cabinet (ministériel) ferait florès au service du protocole des Affaires étrangères où de tout temps, on applique la loi prescrite par Pascal : « L’esprit de finesse ». Finalement, un homme courtois et poli est un Français diplomate ou un Britannique qui n’est guère occupé, pour parodier quelque peu Montesquieu.

En matière de bons mots, il faudrait aussi citer  cette chère Madame de Staël qui résumait la politesse en cela qu’elle « est la juste mesure des relations des hommes entre eux».
Dans cet idéal d’« harmonie universelle », chacun devrait y prendre sa part et en cela l’auteur donne des exemples qui pourraient laisser penser que bien souvent on préfère sacrifier la politesse pour passer pour importun…

« Parfois, un principe induit des injonctions opposées, s’exclame-t-il. Prenez le respect, encore :  il appelle aussi bien la pudeur que la galanterie. Or, si la première commande  à un homme de précéder une femme lorsque tous deux s’apprêtent à monter un escalier, la seconde, au contraire, lui intime de la laisser passer. Laquelle doit primer ? La pudeur, bien sûr ! ».
On le voit parfois, le courtois n’est pas le seul homme poli….

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